Le budget de fonctionnement prévu pour 2026 atteint 3694,9 milliards de fcfa, un montant rarement atteint dans l’histoire budgétaire récente du pays. Pour prendre la mesure de cette évolution, il suffit de rappeler que le budget total de l’État gabonais tournait autour de 3700 milliards de fcfa en 2016, dix ans plus tôt. Autrement dit, ce que le pays mobilisait jadis pour financer l’ensemble de son action publique sert aujourd’hui à financer uniquement son fonctionnement courant.
Cette comparaison, qui ne nécessite aucun effet de manche, met en lumière une transformation silencieuse de la structure budgétaire. Le fonctionnement a progressé beaucoup plus vite que la capacité de financement de l’État. Dans le même temps, les recettes propres, pourtant annoncées à 4153,9 milliards de fcfa, ne suffisent plus à couvrir ce fonctionnement élargi. La dynamique est donc structurelle, non conjoncturelle.
La situation montre que l’appareil administratif pèse désormais d’un poids équivalent à celui de l’État gabonais dans son ensemble il y a une décennie. Une évolution qui interroge, surtout dans un contexte de discours officiels axés sur la discipline budgétaire. L’investissement, de son côté, plafonne à 2 119,2 milliards de fcfa, soit presque moitié moins que le fonctionnement. Un rapport inverse de ce que l’on observe dans des phases de transformation économique ou de modernisation publique.
Face à cette réalité, l’accent mis sur des niches budgétaires comme les Comptes d’Affectation Spéciale semble secondaire. Les CAS cumulent 254,1 milliards de fcfa, un montant dérisoire au regard de l’ampleur des dépenses courantes. Les encadrer davantage n’aura qu’un effet marginal sur l’équilibre global, mais crée l’impression d’une action ciblée, là où les marges de manœuvre sont politiquement plus acceptables.
Ainsi, sans jamais le dire frontalement, le PLF 2026 révèle une administration devenue aussi lourde que l’État tout entier il y a dix ans. Le lecteur attentif percevra, derrière les équilibres affichés, la question centrale : peut-on réellement transformer le pays quand le fonctionnement finit par absorber la quasi-totalité de l’énergie budgétaire ?








