Alors que les conférences budgétaires pour l’exercice 2026 s’ouvrent dans un format rénové à la Vice-Présidence du Gouvernement, la promesse d’un budget « réaliste, responsable et orienté vers les résultats » sonne comme un écho aux critiques formulées par la Banque mondiale dans sa dernière note de conjoncture. L’institution de Bretton Woods pointait récemment « l’inadéquation persistante entre les recettes projetées et les dépenses engagées », dénonçant un manque de sincérité budgétaire. Derrière la volonté de modernisation affichée, le gouvernement entend désormais responsabiliser chaque ministère.
Désormais, les départements sectoriels doivent non seulement identifier leurs sources de recettes propres, mais également formuler des objectifs clairs assortis de mécanismes de suivi. Une initiative saluée pour son principe, mais qui reste, selon les observateurs, largement théorique tant que les bases de la mobilisation fiscale ne sont pas élargies. Comme le rappelait la Banque mondiale, la pression fiscale au Gabon demeure en deçà du potentiel réel, en raison d’exonérations mal ciblées, d’un secteur informel massif, et de mécanismes de recouvrement inefficients.
Ce cadre budgétaire revu s’inscrit dans la perspective du Gabon Economic Forum et de sa promesse d’une croissance forte, durable et inclusive de 10 % à moyen terme. Mais là encore, la Banque mondiale invite à la prudence. Dans sa note publiée en juin 2025, elle soulignait que « la discipline budgétaire reste volatile et les réformes structurelles peinent à se traduire en résultats concrets ». Pour tenir ses engagements, le pays devra aller au-delà de l’affichage technique et renforcer les capacités réelles d’exécution budgétaire. La désynchronisation entre planification et capacité administrative reste un obstacle majeur.
Il est aussi permis de s’interroger sur la capacité du gouvernement à instaurer une culture de la redevabilité. Les précédents exercices budgétaires ont souvent été marqués par des dérapages dans l’exécution, des transferts sans traçabilité et un recours croissant aux dépenses extra-budgétaires. Dans ce contexte, la volonté de responsabilisation des ministères doit s’accompagner d’une réforme profonde de la chaîne de la dépense publique et du renforcement des organes de contrôle. Une transparence accrue sur les subventions, les marchés publics et les transferts inter-étatiques est indispensable pour crédibiliser l’effort de redressement.
Si le format de ces conférences budgétaires tranche avec les habitudes du passé, leur portée réelle dépendra de la volonté politique à assumer les choix parfois douloureux qu’exige la sincérité budgétaire. Comme le souligne la Banque mondiale, « sans un alignement ferme entre priorités politiques, enveloppes budgétaires et résultats attendus, l’écart entre ambition et exécution ne cessera de se creuser ». Le Gabon a entamé une course contre la montre : entre affichage réformateur et rigueur budgétaire, l’heure n’est plus aux slogans, mais aux preuves.