Le ministère des Affaires étrangères du Gabon a récemment déposé un projet de loi visant à ratifier la Convention de l’Union africaine sur la cybersécurité et la protection des données personnelles, plus connue sous le nom de Convention de Malabo. Cette convention, adoptée en 2014, vise à harmoniser les législations africaines en matière de cybersécurité, un enjeu d’une importance capitale à l’échelle continentale face à l’évolution rapide des menaces cybernétiques.
Didier Simba, expert international en cybersécurité et directeur général de DSTrust, analyse cette initiative, soulignant son importance mais aussi les défis qui attendent le Gabon.
Les objectifs de la Convention de Malabo
La Convention de Malabo repose sur plusieurs objectifs stratégiques qui visent à renforcer la cybersécurité à travers le continent. Ces objectifs incluent :
- Protection des données personnelles : Chaque État membre doit mettre en place des lois pour protéger les données personnelles de ses citoyens et garantir le respect de leurs droits.
- Cybersécurité : Les États doivent adopter des stratégies nationales de cybersécurité, mettre en place des organismes dédiés et promouvoir la coopération régionale pour contrer les menaces cyber.
- Lutte contre la cybercriminalité : La convention criminalise diverses infractions comme le piratage, la fraude en ligne, et le vol d’identité.
- Confiance numérique : En établissant un cadre juridique sécurisé, la convention vise à encourager les investissements dans l’économie numérique et les nouvelles technologies.
Pour le Gabon, la ratification de cette convention représente une étape décisive pour se conformer aux normes internationales et renforcer son cadre juridique en matière de cybersécurité. Cela aura pour effet de protéger les citoyens, les entreprises et les institutions publiques contre les attaques cybernétiques, tout en facilitant l’attraction des investissements dans le secteur numérique. Une réglementation forte et adaptée est un signal rassurant pour les entreprises cherchant à opérer dans un environnement numérique sécurisé.
Les défis à surmonter
Toutefois, Didier Simba attire l’attention sur les défis auxquels le Gabon doit faire face pour mettre en œuvre cette convention. La première difficulté réside dans la complexité de la mise en œuvre. La ratification n’est que le début : il faudra mobiliser des ressources humaines et financières pour créer les structures administratives nécessaires et adapter les lois nationales aux exigences de la convention. De plus, le Gabon, comme de nombreux pays africains, manque de compétences techniques pour gérer efficacement la cybersécurité, ce qui pourrait ralentir l’application de ces nouvelles régulations.
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Un autre aspect important est le déficit d’actualisation de la Convention de Malabo. Adoptée en 2014, elle ne prend pas en compte les nouvelles menaces qui ont émergé depuis, telles que l’intelligence artificielle, les objets connectés ou le métavers. Ces technologies, devenues centrales dans le cyberespace, nécessitent une réglementation spécifique et urgente pour garantir la sécurité des utilisateurs et des systèmes.
L’urgence d’une stratégie nationale
Didier Simba insiste particulièrement sur l’absence actuelle de stratégie nationale de cybersécurité au Gabon. Bien que des initiatives existent, elles manquent souvent de coordination et de vision à long terme. Une stratégie nationale permettrait de centraliser les efforts, d’optimiser les ressources disponibles et d’assurer une meilleure protection contre les cybermenaces. Cette démarche est fortement recommandée par la Convention de Malabo, qui appelle les États membres à élaborer des stratégies nationales pour une cybersécurité efficace et cohérente.
Expert international en cybersécurité
Directeur général de DSTrust