Avec seulement 928 agents et un budget de 6,2 milliards de fcfa en 2025, le ministère gabonais du Travail et de la Lutte contre le Chômage apparaît bien faible face à l’ampleur du défi. Dans un pays où le chômage global dépasse les 30%, et où près d’un jeune sur trois reste sans emploi, cette enveloppe paraît symbolique plus que stratégique. Elle traduit une volonté politique limitée, alors que le chômage est l’un des principaux moteurs de pauvreté et d’instabilité sociale.
La comparaison avec d’autres pays africains est éclairante. En Afrique du Sud, le ministère de l’Emploi et du Travail bénéficie d’un budget de plus de 4 milliards de rands (plus de 130 milliards de fcfa), avec des programmes étendus de subventions et d’allocations chômage. Au Nigeria, même avec des contraintes budgétaires, le ministère du Travail dispose de 46 milliards de nairas (environ 42 milliards de fcfa), soit près de sept fois plus que le Gabon. Ces ressources, bien que jugées insuffisantes par leurs propres gouvernements, sont néanmoins bien supérieures à celles dont dispose Libreville.
Avec ses moyens actuels, le ministère gabonais peine à dépasser ses fonctions administratives de base. Les programmes d’accompagnement à l’emploi, de formation professionnelle et de soutien à l’entrepreneuriat restent embryonnaires. Faute de moyens financiers et humains, les besoins réels du marché du travail sont mal identifiés, et les dispositifs existants touchent une minorité de jeunes. L’écart entre le discours officiel sur la lutte contre le chômage et les moyens réellement mobilisés se creuse d’année en année.
Cette sous-allocation budgétaire a des conséquences directes : inadéquation entre la formation et l’emploi, faible couverture territoriale, marginalisation des zones rurales et absence d’incitations fortes à la création d’emplois productifs. Le chômage structurel se perpétue, alimentant frustration sociale et précarité économique. Loin d’être un outil de transformation, le ministère du Travail apparaît comme une administration en survie, incapable d’impacter durablement le marché de l’emploi.
À l’heure où le Gabon affiche des ambitions de diversification économique et de modernisation, la lutte contre le chômage devrait pourtant figurer au cœur des priorités budgétaires. Renforcer les effectifs, multiplier les centres de formation adaptés aux besoins du marché, soutenir l’entrepreneuriat local et investir massivement dans l’employabilité des jeunes sont des impératifs. Car sans une véritable stratégie nationale de l’emploi, appuyée par des moyens conséquents, le chômage restera la principale bombe sociale du pays.