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Gabon : l’endettement massif, une bombe à retardement ?

le coup de coeur

En promettant de mobiliser 1000 milliards fcfa d’investissements par an, dont 75% par emprunt, Brice Clotaire Oligui Nguéma projette un recours massif à l’endettement : 5250 milliards fcfa sur 7 ans. Dans un pays dont la dette publique dépassait déjà plus de 7000 milliards en 2023, cette orientation inquiète les observateurs. D’autant plus que le projet de société ne précise pas clairement les modalités de remboursement ni les conditions de ces prêts.

Quid des capacités institutionnelles et techniques ?

Le recours à l’endettement n’est pas illégitime en soi. Il peut servir à financer des infrastructures productives capables de générer des retombées économiques à moyen et long terme. Mais pour cela, encore faut-il que les projets soient bien sélectionnés, exécutés dans les délais, et accompagnés de mécanismes de suivi et d’évaluation indépendants. Le Gabon n’en est pas à sa première annonce de grands travaux. L’histoire récente du pays est jalonnée de projets mal planifiés, surévalués ou abandonnés en cours de route.

La question est donc de savoir si l’État gabonais dispose aujourd’hui des capacités institutionnelles et techniques pour absorber un tel volume d’investissement sans sombrer dans un surendettement incontrôlé. Le projet de société évoque des « investissements structurants », mais sans établir de hiérarchisation claire ni de stratégie de rentabilisation. Or, emprunter massivement sans perspective claire de retour sur investissement revient à hypothéquer les finances publiques de demain.

Un surendettement lourd de conséquences

Autre élément de préoccupation : les taux d’intérêt. Le Gabon, noté spéculatif par les agences de notation, devra emprunter à des conditions potentiellement coûteuses. Cela pourrait alourdir davantage le service de la dette, qui représente déjà une part importante du budget. Et si ces prêts sont contractés en devises étrangères, la volatilité du franc cfa face à l’euro ou au dollar pourrait aggraver la situation. Ce type d’endettement pourrait ainsi peser lourdement sur les générations futures, d’autant plus si les projets financés ne génèrent pas des revenus suffisants pour amortir les remboursements.

Ce scepticisme est renforcé par les pratiques contractuelles actuelles. Depuis la transition, plusieurs marchés importants ont été attribués de gré à gré à des entreprises étrangères, notamment burkinabè, pour des montants dépassant les 400 milliards fcfa. Ces contrats, non soumis à la concurrence, ont été financés directement par l’État. Ils reflètent une forme d’endettement déguisé ou anticipé, et posent la question de la transparence dans la programmation des dépenses futures. L’endettement, s’il est mal encadré, pourrait devenir une bombe à retardement pour les finances publiques gabonaises.

ENCADRÉ : état des lieux de la dette du Gabon 
En 2023, la dette publique du Gabon dépassait les 7000 milliards fcfa, représentant environ 65% du PIB. Le pays consacre déjà chaque année plus de 300 milliards fcfa au service de la dette. En ajoutant 5250 milliards fcfa d’emprunts supplémentaires comme le prévoit le programme du candidat Oligui Nguéma, l’encours pourrait grimper à des niveaux proches de 80% du PIB d’ici 2030. Une telle dynamique d’endettement n’est soutenable que si les fonds empruntés financent des projets véritablement productifs. Sans rigueur budgétaire et mécanismes de contrôle indépendants, le Gabon pourrait entrer dans un cycle de dépendance accrue aux marchés financiers et aux bailleurs internationaux. Et pour l'instant, le candidat n'a présenté aucun mécanisme de contrôle capable de servir de garde-fou aux dérapages constatés pendant la transition. 

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