Le Gabon semble être pris dans un cycle sans fin où les pratiques électorales anciennes, longtemps dénoncées, refont surface de manière inquiétante. Lors de la cérémonie de clôture de la campagne en faveur du « Oui » au projet de révision constitutionnelle, qui se tient actuellement au Palais des Sports de Libreville, des centaines de Gabonais ont été transportés pour assister à un spectacle qui n’avait d’électoral que le nom. En échange de quelques billets de 5000 fcfa, des jeunes, des femmes et des hommes parmi les plus vulnérables de la société ont été conviés à cet événement, sans même avoir conscience des véritables enjeux du projet de révision constitutionnelle. Certains n’ayant même pas encore atteint l’age de la majorité, des mineurs. Ce retour aux méthodes clientélistes et manipulatrices du passé qui transforment des électeurs en « Bœufs votants », soulève de vives inquiétudes sur l’évolution de la politique gabonaise.
Les scènes observées lors de cet événement rappellent cruellement les pratiques du Parti démocratique gabonais (PDG), un parti qui a souvent été accusé de réduire les électeurs à une simple monnaie d’échange. L’utilisation de l’argent pour acheter la volonté de citoyens démunis, les transporter dans des bus comme du bétail et les faire participer à des rassemblements sans que ces derniers ne comprennent les enjeux politiques est une méthode vieille comme le monde. Une stratégie qui, visiblement, n’a pas été abandonnée mais simplement réadaptée. Cette manipulation des masses, où les promesses financières priment sur l’éducation politique et le débat de fond, semble avoir été réactivée dans le cadre de la campagne pour le « Oui » à la révision de la Constitution.

Quand la politique utilise la misère des populations
Ce phénomène de manipulation de masse, où les électeurs sont considérés comme des objets à manipuler pour garantir un résultat électoral favorable, s’inscrit dans une logique politique de contrôle total. Si ces citoyens, conduits en bus jusqu’au Palais des Sports, sont censés être les soutiens d’un projet de révision constitutionnelle, la réalité est toute autre. Beaucoup d’entre eux ignoraient de quoi il retournait réellement, n’ayant pas été informés sur les tenants et aboutissants du texte, ni sur les raisons profondes de la réforme proposée. Ils sont venus non pas par conviction, mais parce qu’on leur a promis quelques billets pour leur participation, un triste rappel de la façon dont la politique gabonaise a longtemps utilisé la misère sociale pour assurer la fidélité de ses électeurs.

Ondo Ossa a-t-il eu raison trop tôt ?
Le Pr Albert Ondo Ossa, leader de l’opposition, n’a pas manqué de rappeler dans ses déclarations de la semaine que le Gabon devait absolument «rompre définitivement avec un système qui a plongé le pays dans le chaos». Ces propos font écho à la situation actuelle, où les citoyens sont encore traités comme de simples instruments pour maintenir un pouvoir en place. Pour Ondo Ossa, il est vital de sortir de cette logique clientéliste et de favoriser un véritable changement démocratique, où le choix des Gabonais se fait en toute connaissance de cause et sans manipulation. La situation décrite au Palais des Sports est une illustration parfaite de ce système archaïque qu’il dénonce, où la manipulation prime sur la vérité et l’engagement politique sincère.
Le retour des « Bœufs votants » ou l’affront à la dignité des Gabonais
Le retour de ces « Bœufs votants » est non seulement un affront à la dignité des Gabonais, mais il met en lumière un problème profond qui touche le cœur même de la démocratie dans le pays. Si les Gabonais veulent véritablement se «libérer» de ce cycle de manipulation, il est urgent de rétablir une politique fondée sur le respect, l’écoute et la participation éclairée des citoyens. Pour cela, il est impératif de mettre fin à ces pratiques clientélistes et de promouvoir un modèle politique où la manipulation et l’achat de votes n’ont plus aucune place. Les Gabonais méritent un avenir où leur voix compte véritablement, et non un système où leur soutien est acheté au prix de quelques billets de banque.