spot_img

Notre devoir, servir la vérité.

spot_img

Émission “1 candidat, 1 projet” : 7000 milliards de fcfa d’investissements, une ambition démesurée pour Oligui ?

le coup de coeur

Lors de l’émission « 1 candidat, 1 projet », Brice Clotaire Oligui Nguéma a annoncé un plan d’investissement public de 1 000 milliards fcfa par an s’il est élu, soit 7 000 milliards sur un mandat de sept ans. Une ambition impressionnante qui illustre la volonté du candidat de transformer en profondeur les infrastructures, l’économie et les services publics.

Effort coordonné de mobilisation

Selon le projet de société de Brice Clotaire Oligui Nguema, ces investissements viseraient à financer notamment les routes, les hôpitaux, l’eau, l’électricité, l’éducation, l’agriculture et l’industrialisation. Il y est mentionné que ces projets seront accompagnés d’« un effort coordonné de mobilisation de ressources internes et externes ».

Mais derrière cette déclaration, se cache une répartition financière lourde de conséquences. Le candidat a lui-même précisé que « 75% de ce montant sera emprunté, le reste sera financé par l’État ». Cela signifie que 5250 milliards fcfa proviendraient de nouveaux emprunts, tandis que 1750 milliards seraient pris directement sur le budget national. Ce choix stratégique soulève des questions sur l’endettement futur du pays et sur les marges budgétaires réelles de l’État, qui doit déjà faire face à des charges structurelles très lourdes.

Quid des mécanismes de financements ?

Le projet de société ne précise pas encore les mécanismes exacts de financement : via des obligations souveraines ? Des emprunts multilatéraux ? Des PPP ? Cette opacité laisse planer un doute sur la faisabilité de ce programme. Par ailleurs, il faudra convaincre des bailleurs déjà prudents à l’égard du Gabon, dont la situation financière demeure fragile malgré la transition politique. Sans garanties solides de bonne gouvernance et de rentabilité des projets, l’accès à ces ressources pourrait s’avérer plus complexe que prévu.

À titre de comparaison, 7000 milliards fcfa sur 7 ans représentent plus que l’ensemble du budget de l’État pour une année entière (estimé autour de 4000 milliards fcfa en 2024). Cela implique une transformation radicale de la manière de dépenser et d’allouer les ressources, ainsi qu’une capacité de gestion des projets très renforcée. La mise en œuvre devra être irréprochable pour éviter les écueils du passé, où des programmes ambitieux ont échoué faute de pilotage rigoureux.

Une volonté de rupture contredite ?

La volonté de rupture affichée par le candidat semble pourtant contredite par certaines pratiques déjà à l’œuvre. Depuis son arrivée au pouvoir, Oligui Nguéma a signé plusieurs contrats d’envergure avec des entreprises burkinabè, notamment dans les secteurs des travaux publics et de l’habitat, pour un montant cumulé dépassant 400 milliards fcfa. Ces accords, conclus sans appels d’offres publics et financés par l’État, posent question sur la transparence et la conformité avec les engagements de gouvernance contenus dans son propre projet de société. L’investissement massif ne pourra porter ses fruits que si les effets attendus sur l’emploi, la diversification économique et la réduction de la pauvreté sont tangibles, et si les méthodes de passation des marchés sont cohérentes avec les principes de redevabilité.

ENCADRÉ : Investissements : une ambition jamais atteinte au Gabon 

Depuis l’indépendance, aucun gouvernement n’a jamais réussi à mobiliser un volume d’investissements publics équivalent à 1 000 milliards fcfa par an de manière constante. Le Plan Stratégique Gabon Émergent (PSGE), mis en œuvre sous Ali Bongo, visait des niveaux similaires sans jamais atteindre ses objectifs. La plupart des projets furent ralentis ou suspendus, faute de financements ou de capacités de mise en œuvre. Le programme de 7000 milliards sur 7 ans proposé par Oligui Nguéma constituerait donc un tournant historique, mais il repose sur une hypothèse très optimiste de mobilisation de ressources et d’efficacité de l’exécution budgétaire. Le précédent historique invite à la prudence.
spot_img
spot_img
spot_img
spot_img
spot_img
spot_img

Derniers Articles