La Banque africaine de développement (BAD) estime que le Gabon doit mobiliser environ 1,18 milliard de dollars par an, soit près de 775 milliards de fcfa d’ici 2030 pour financer sa transformation structurelle. Ce montant représente les besoins annuels pour atteindre le niveau de performance économique des pays en développement les plus avancés, et couvre en priorité les infrastructures (72,2%), l’énergie (12%) et l’éducation (11,1%). À ce jour, seuls 14,6% de ces besoins sont couverts, laissant un déficit de près de 656 milliards fcfa par an. « Pour combler ce déficit par des mesures fiscales, le Gabon devrait augmenter son taux de pression fiscale de 4,5 points de pourcentage », souligne le rapport pays 2025 de la BAD. Ce dernier rappelle que le pays affiche un taux moyen de 11,9% du PIB, bien en deçà de la Namibie (30,5%), l’Afrique du Sud (24,9%) et le Botswana (22,9%).
Comparativement, le document de cadrage macroéconomique et budgétaire 2026-2028 du gouvernement gabonais retient des prévisions d’investissements publics bien plus modestes : 4264 milliards fcfa sur trois ans, soit environ 1421 milliards fcfa par an. Si ce chiffre est supérieur aux besoins annuels estimés par la BAD, il intègre l’ensemble des dépenses d’investissement, y compris celles déjà inscrites dans les budgets sectoriels, et non uniquement les besoins additionnels. L’écart méthodologique montre que la BAD se concentre sur la partie non financée nécessaire pour combler le retard, tandis que le gouvernement inclut également les projets déjà en cours de réalisation ou financés par des ressources internes et extérieures.
Le gouvernement, fort du gap à combler, a lancé un Plan national de croissance et de développement (PNCD) estimé à 10 000 milliards de fcfa sur la période 2026-2030. L’ambition est d’atteindre une croissance à deux chiffres sachant qu’« une croissance de 2 ou 3% ne suffit plus face au taux de croissance de la population, de l’inflation et des besoins sociaux. », a affirmé Henri-Claude Oyima, ministre de l’Économie et des Finances. Pour atteindre cet objectif, les autorités comptent diversifier les sources de financement, notamment via des partenariats public-privé (PPP), des émissions d’obligations souveraines et le recours à des financements verts et climatiques.
La question du financement demeure toutefois centrale. En supposant un maintien de la capacité d’endettement et une attractivité suffisante pour les investisseurs, le Gabon devrait lever en moyenne plus de 500 milliards fcfa par an en capitaux nouveaux pour couvrir son déficit annuel tout en maintenant l’exécution de ses programmes prioritaires. Le document de cadrage 2026-2028 met en avant la nécessité d’optimiser la mobilisation des recettes internes, notamment à travers la réforme fiscale, l’élargissement de l’assiette et la digitalisation de l’administration financière.
À l’horizon 2030, la convergence des estimations de la BAD et du gouvernement gabonais laisse entrevoir un défi à double niveau : trouver les financements, mais surtout assurer leur efficacité dans des projets à fort impact. Entre la vision optimiste du PNCD et la prudence analytique de la BAD, le chemin est étroit mais stratégique. La réussite dépendra autant de la mobilisation des ressources que de la capacité à les convertir en infrastructures, éducation et énergie, véritables leviers de transformation économique.