La nouvelle est tombée comme un coup de tonnerre ce 16 mai : Ali Bongo Ondimba, son épouse Sylvia et leur fils Noureddine ont quitté le Gabon pour l’Angola, où ils résident désormais en exil. L’annonce, faite par la Présidence angolaise via sa page Facebook officielle, intervient moins de 24 heures après leur départ discret de Libreville. Cette sortie du territoire, non confirmée au préalable par les autorités gabonaises, suscite un vif émoi au sein de l’opinion publique, qui s’interroge sur la gestion opaque de cette affaire aux multiples ramifications judiciaires.
Pour tenter de calmer la vague d’indignation, le procureur général près la Cour d’appel de Libreville, Eddy Minang, a apporté des précisions ce vendredi. Il a révélé que Sylvia Bongo et son fils Noureddine avaient bénéficié, le 14 mai, d’une liberté provisoire pour des raisons médicales. « La liberté est le principe, la détention l’exception, et cette mise en liberté provisoire, ordonnée pour des raisons médicales, s’inscrit dans le strict respect des dispositions des articles 132 et 143 du code de procédure pénale », a-t-il déclaré. Il a également précisé que « l’Agence judiciaire de l’État a déclaré ne pas s’opposer à ces demandes pour raisons humanitaires ».
Cependant, cette libération à titre provisoire, présentée comme une mesure d’exception, ne suffit pas à dissiper les doutes. De nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer un traitement différencié, alors que plusieurs anciens hauts responsables proches du régime Bongo, impliqués dans les mêmes dossiers, demeurent incarcérés à « sans familles ». Pourquoi seuls les membres de la famille présidentielle ont-ils été autorisés à quitter le pays, sans qu’aucune date de procès ne soit annoncée ?
Cette décision semble à l’opposée des engagements pris par les nouvelles autorités de la transition, en particulier par le président Brice Clotaire Oligui Nguema. Ce dernier avait promis, à la veille de l’élection présidentielle, un procès équitable et public pour les figures de l’ancien pouvoir impliquées dans des faits de corruption, de détournement de fonds et d’atteinte à la sûreté de l’État. Le départ en Angola, sans procès ni communication claire sur l’avenir judiciaire des intéressés, affaiblit cet engagement aux yeux de l’opinion.Au-delà de l’aspect humanitaire invoqué par la justice, c’est la crédibilité de l’État et la cohérence de la lutte contre l’impunité qui sont aujourd’hui remises en cause. L’exil de la famille Bongo relance le débat sur la volonté réelle des autorités de tourner la page de l’ancien régime, dans le respect du droit et de la transparence. « Je précise que cette mesure n’interrompt nullement le cours normal de la procédure, qui se poursuivra jusqu’à la tenue d’un procès équitable », a conclu le procureur. Reste à savoir quand et comment.