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Gabon : faut-il croire à un taux de croissance de 6,5% dans le contexte actuel ?

le coup de coeur

L’annonce d’un objectif de croissance de 6,5% en 2026 tombe comme un pavé dans la mare, tant elle semble déconnectée des dynamiques économiques réelles du pays. Alors que le gouvernement présente cette prévision comme le symbole d’un redressement accéléré, les fondamentaux ne permettent guère d’y croire. Entre un appareil productif qui peine à se diversifier, une administration en surchauffe et une de conjoncture mondiale défavorable, l’hypothèse d’une croissance quasi multipliée par trois relève davantage de l’incantation que d’un cadrage macroéconomique sérieux.

Les projections internationales, elles, ne s’encombrent pas de volontarisme politique. Le Fonds monétaire international anticipe 2,6%, tandis que la Banque africaine de développement table sur 2,2% pour 2026. L’écart est abyssal. Comment expliquer que les institutions qui surveillent étroitement les équilibres économiques régionaux aboutissent à des prévisions trois fois plus basses que celles affichées par l’exécutif ? Ce contraste questionne la crédibilité des modèles utilisés par les autorités et suggère une surestimation flagrante des effets attendus des réformes annoncées.

Les contraintes internes renforcent ce scepticisme. L’État se dote certes d’un budget d’investissement de 2119,2 milliards de fcfa, un niveau record, mais les capacités d’absorption du pays restent limitées : retards récurrents dans les projets, lourdeurs administratives, faible coordination des politiques publiques, et exécution budgétaire rarement à la hauteur des montants prévus. Miser sur une croissance exceptionnelle suppose une administration opérationnelle, rapide, disciplinée, soit exactement le contraire de ce que montrent les bilans d’exécution des dernières années.

S’ajoute à cela un paradoxe budgétaire inquiétant : alors que le gouvernement promet une montée en puissance de l’investissement, les dépenses de fonctionnement, elles, continuent d’augmenter, passant de 3569 milliards à 3694,9 milliards de fcfa dans la nouvelle version du budget 2026. Autrement dit, l’État nourrit encore davantage sa machine interne au détriment de la transformation structurelle qu’il prétend accélérer. Comment espérer une croissance à 6,5% lorsque l’essentiel de l’effort financier continue d’être aspiré par des charges récurrentes au lieu d’être orienté vers les secteurs productifs ?

En définitive, la prévision de 6,5% ressemble moins à un objectif économique qu’à un message politique. Une manière de rassurer, d’afficher une ambition forte, peut-être même de masquer les limites d’un modèle économique encore fragile. Mais les chiffres, eux, ne mentent pas : sans réformes profondes, sans discipline administrative, sans exécution rigoureuse des investissements et sans redéploiement massif vers la création de valeur, la croissance effective restera proche des estimations du FMI et de la BAD. La vraie question n’est donc pas de savoir si le Gabon atteindra 6,5 %, mais pourquoi le gouvernement continue d’entretenir une illusion qui n’est corroborée par aucun indicateur tangible.

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