Après des années de turbulences financières et de scandales de gestion, Gab’Oil, ex-filiale de Gabon Oil Marketing (GOM), fait son grand retour au sein de la Gabon Oil Company (GOC). Une décision actée au cours du conseil des ministres du 17 janvier dernier. Officiellement, cette absorption vise à consolider les actifs pétroliers publics et à optimiser la gestion du secteur. Mais en réalité, ce transfert ressemble davantage à une tentative de sauvetage d’une entreprise en faillite, dont les dettes et les irrégularités pourraient devenir un fardeau supplémentaire pour la GOC.
Déjà sous le poids d’un plan social inachevé et d’une réputation entachée par des malversations financières de grande ampleur, Gab’Oil traîne des casseroles qui risquent d’aggraver les difficultés de sa nouvelle maison-mère. La GOC, censée incarner un modèle de gestion plus efficace et transparente, se retrouve ainsi à absorber une entité dont la viabilité économique est sérieusement remise en question. Ce choix stratégique pourrait accroître les tensions internes, fragiliser les finances de l’entreprise et retarder les efforts de restructuration déjà en cours.
L’autre grande inconnue réside dans la capacité financière de la GOC à supporter ce transfert. D’ici cinq ans, la société nationale doit rembourser 744 milliards de fcfa au négociant Gunvor, une charge colossale qui pèse sur sa trésorerie et ses investissements futurs. Or, intégrer une entité déficitaire comme Gab’Oil pourrait déstabiliser davantage ses finances et réduire ses marges de manœuvre. Plutôt que de renforcer son rôle stratégique dans le secteur pétrolier, cette fusion risque donc de lui ajouter un poids supplémentaire au moment où elle doit justement assainir sa situation.
Au-delà de l’impact économique, cette réintégration pose aussi un problème de gouvernance et d’image. Comment justifier l’absorption d’une entité minée par les scandales et encore en pleine crise sociale ? La GOC, censée incarner une gestion plus rigoureuse et performante des hydrocarbures au Gabon, prend le risque de s’associer à des pratiques du passé qui ont déjà coûté cher à l’État. Cette fusion pourrait raviver les tensions sociales, notamment parmi les anciens employés de Gab’Oil laissés sur le carreau, et nuire à la crédibilité des réformes engagées dans le secteur.
En fin de compte, le retour de Gab’Oil dans le giron de la GOC apparaît moins comme une opportunité que comme un pari risqué. Entre risques financiers, incertitudes stratégiques et passif lourd, cette absorption pourrait bien compliquer davantage l’avenir de la société nationale des hydrocarbures, déjà sous forte pression. Reste à savoir si cette opération permettra réellement de rationaliser le secteur ou si elle ne fera qu’accentuer les difficultés d’un acteur clé de l’économie gabonaise.