Ce n’est pas une surprise, tant le géant burkinabè faisait une cour assidue au gouvernement gabonais. Ce 5 février 2025, il a signé un accord historique avec le groupe Ebomaf, lui confiant la gestion de la Compagnie nationale de navigation intérieure et internationale (CNNII) pour les 20 prochaines années. Un choix stratégique pour sauver une entreprise en grande difficulté, minée par une dette colossale et des mois d’arriérés de salaires. Une décision qui tranche avec les annonces récentes du gouvernement de transition, qui prônait une nationalisation du secteur des transports.
Pour Ebomaf, c’est une entrée fracassante dans le monde maritime. Déjà bien implanté dans le BTP et l’aviation, le groupe promet un plan ambitieux de modernisation de la flotte et des infrastructures portuaires. Et il y a urgence ! En 2023, le chiffre d’affaires du transport maritime gabonais a reculé de 0,9% pour atteindre 73,1 milliards de fcfa, tandis que les investissements se sont effondrés de 85,3 %, chutant de 51,6 milliards à seulement 7,6 milliards de fcfa. Avec cette concession, Ebomaf devra redresser un secteur en crise et redonner à la CNNII une compétitivité capable de soutenir l’économie gabonaise, fortement dépendante du transport maritime.
Un impact positif sur l’emploi
Mais ce revirement interroge : le Gabon est-il en train de renoncer au contrôle de ses infrastructures stratégiques faute de moyens pour les moderniser ? Côté du gouvernement, on justifie cette privatisation par la nécessité d’un renouveau rapide. L’objectif affiché est de relancer un secteur clé en s’appuyant sur un acteur privé aux reins solides, capable d’injecter des fonds là où l’État peine à suivre. Cette stratégie pourrait aussi avoir un impact positif sur l’emploi : en 2023, le secteur maritime gabonais comptait 1567 salariés, en hausse de 8,4% sur un an. Avec l’arrivée d’Ebomaf, les embauches pourraient s’accélérer, notamment pour répondre aux besoins de modernisation des infrastructures et des services portuaires.
Partenariat public-privé
Cependant, cette concession est aussi un signal clair : malgré les promesses de nationalisation du gouvernement de transition, le Gabon fait le choix d’ouvrir davantage son économie aux capitaux privés. Ce virage libéral assumé démontre les difficultés du pays à entretenir et moderniser ses infrastructures sans appui extérieur. Face aux contraintes budgétaires et à la baisse des investissements publics, l’État semble avoir trouvé dans le privé une alternative incontournable, quitte à renoncer à une partie de son contrôle sur un secteur stratégique.
Alors que ce partenariat commence à peine, une question demeure : le Gabon a-t-il réellement eu le choix ? Entre un secteur maritime en crise et une économie sous pression, cette privatisation ressemble moins à un pari audacieux qu’à une nécessité imposée. Reste à voir si Ebomaf tiendra ses promesses et si ce modèle pourra être répliqué à d’autres pans des transports gabonais. Une chose est sûre, cette décision marque un tournant majeur pour l’avenir du pays.