Le Gabon a célébré la Journée mondiale de la liberté de la presse ce vendredi 30 mai, en différée, en plaçant sa réflexion sous le signe de l’intelligence artificielle (IA) et de son influence croissante sur les pratiques médiatiques. À l’heure où l’IA transforme la production et la diffusion de l’information, cette thématique, à la fois actuelle et complexe, a réuni à Libreville journalistes, organisation des médias, responsables publics, notamment du ministère de la Communication et des Médias, et experts du numérique.
Un outil puissant… mais exigeant
Ouvrant les travaux, le ministre de la Communication et des Médias, Paul-Marie Gondjout, a souligné la nécessité « d’un usage maîtrisé de l’IA dans les médias ». Au fil des ateliers, les participants ont découvert comment l’intelligence artificielle peut accompagner le journalisme dans : « automatisation de certains contenus, assistance à la vérification des faits, traitement de grands volumes d’information », assure Magloire Christophe Blampain, expert IT et innovation. Les bénéfices sont réels, notamment en matière de rapidité et d’analyse. Mais les intervenants ont aussi mis en garde contre les risques de désinformation, de manipulation ou d’effacement du jugement humain.

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Dans les rédactions, l’IA est désormais perçue moins comme une menace que comme un levier d’adaptation. Mais face à cette crainte, les experts ont rassuré : « Elle ne remplace pas l’intuition ni l’expérience. Elle doit être un outil, pas un substitut », ont-ils tous insisté.
Des recommandations concrètes et ciblées
Pour encadrer l’introduction de ces technologies dans l’écosystème médiatique gabonais, plusieurs recommandations ont été formulées à l’issue de la journée, à travers la lecture d’un rapport faite par Ndzoundou Ndzoundou. D’abord, il a été proposé de renforcer la formation des journalistes, afin qu’ils comprennent non seulement les outils eux-mêmes, mais aussi les enjeux éthiques qu’ils soulèvent. Il s’agirait notamment d’intégrer des modules sur l’IA dans les cursus et de proposer des ateliers réguliers en rédaction.

Autre mesure importante : l’élaboration d’un cadre éthique clair sur l’utilisation de l’IA dans les contenus journalistiques. Cela passerait par des lignes directrices encadrant la transparence vis-à-vis du public, en indiquant par exemple lorsqu’un article ou une infographie a été généré ou enrichi par des algorithmes.
Enfin, la nécessité de préserver la diversité culturelle et linguistique a été soulignée. L’intelligence artificielle, bien utilisée, pourrait contribuer à valoriser les langues nationales et à produire des contenus reflétant les réalités gabonaises, tout en évitant les biais ou stéréotypes issus de bases de données extérieures.

Un journalisme lucide face au futur
En mettant l’IA au cœur de cette journée symbolique, le Gabon affirme sa volonté de ne pas subir les mutations du paysage médiatique, mais d’y prendre part activement. Le défi sera désormais de concilier innovation technologique et exigence journalistique, dans un esprit d’ouverture mais aussi de responsabilité.
Plus largement, cette initiative traduit une volonté d’anticipation face aux bouleversements numériques qui redéfinissent les contours de l’espace public. En posant les premières pierres d’un dialogue national sur l’IA et les médias, le pays envoie un signal fort : celui d’un journalisme qui ne se contente pas de suivre l’évolution du monde, mais qui cherche à en tracer les lignes avec lucidité et courage.