Taxi-Gab, Gab-Pêche… Depuis un an, le gouvernement multiplie les projets spectaculaires, présentés comme des symboles de patriotisme économique et de reprise en main des secteurs clés. Si l’effet d’annonce est indéniable, la réalité est souvent moins reluisante : derrière les inaugurations en fanfare, les projets peinent à s’ancrer durablement dans l’économie nationale, faute de vision stratégique, de moyens pérennes ou de cadres réglementaires solides.
Taxi-Gab illustre parfaitement ce décalage : vanté comme une réappropriation du transport urbain par les Gabonais, le service appartient en réalité à un opérateur privé étranger. Les premiers mois ont été marqués par des pannes récurrentes, des véhicules accidentés et déjà plusieurs unités irrécupérables. L’initiative, qui devait symboliser la renaissance du transport terrestre, ressemble désormais davantage à une opération de communication qu’à un vrai levier de transformation économique.
Avec Gab-Pêche, l’histoire semble se répéter. Le projet promet de replacer les Gabonais au centre de la pêche artisanale grâce à des pirogues et équipements produits localement, financés par un prêt colossal de 25 milliards de fcfa. Mais comme pour Taxi-Gab, la mise en œuvre précède l’installation d’un écosystème solide : formation, structuration des filières, accès aux marchés et protection contre la concurrence étrangère restent largement insuffisants. C’est le syndrome de la “charrue avant les bœufs”, coûteux et risqué.

Ces projets vitrines prennent racine dans une économie fragile, où le pétrole représente encore plus de 60% des recettes publiques et où l’endettement pèse lourd sur les marges de manœuvre budgétaires. L’État peine à honorer certaines dettes intérieures, tandis que les secteurs productifs hors pétrole, agriculture, pêche, industrie légère, restent sous-développés. Dans ce contexte, chaque investissement devrait cibler prioritairement la création d’emplois durables, la substitution aux importations et la montée en compétences locales, plutôt que de se contenter d’effets d’annonce.
À force d’accumuler les projets symboliques sans en assurer la viabilité, le risque est d’épuiser les ressources financières tout en alimentant la désillusion d’une population déjà méfiante face aux promesses politiques. Dans une économie où chaque franc fcfa compte, la priorité devrait être de bâtir des projets économiquement autonomes, inscrits dans une stratégie cohérente de diversification. Faute de quoi, Taxi-Gab, Gab-Pêche et leurs semblables pourraient n’être que des vagues passagères dans une mer de défis structurels.