Le couperet est tombé ce lundi 20 octobre 2025. Le directeur de publication de Gabon Media Time, Harold Leckat Igassela, a été placé sous mandat de dépôt à la prison centrale de Libreville après son audition par un juge d’instruction. Interpellé manu militari à l’aéroport de Libreville le 15 octobre, alors qu’il revenait d’une formation à Montpellier organisée par la plateforme Médias & Démocratie, le journaliste a vu sa garde à vue prolongée plusieurs jours à la Direction générale des Recherches (DGR) avant ce dénouement judiciaire.
L’affaire, qui aurait pour origine un contrat signé en septembre 2020 entre Global Media Time, la société éditrice du média, et la Caisse des dépôts et consignations (CDC), reste enveloppée de zones d’ombre. Officiellement, il s’agirait d’un « détournement de deniers publics », mais aucun élément concret n’a pour l’heure été communiqué. Ce flou alimente les soupçons d’une procédure plus politique que juridique, dans un contexte où la liberté de la presse demeure fragile au Gabon.
Réuni en urgence ce lundi, le Collectif des organisations de la presse (OPAM, UPF, RENAJI, RSF, CPPL, Médias & Démocratie – Gabon) a dénoncé une « cabale politico-judiciaire » destinée, selon lui, à museler les voix indépendantes. Pour ces structures, l’arrestation d’Harold Leckat s’inscrit dans une logique de pression sur les médias critiques, à rebours des engagements pris par les autorités de transition en faveur de l’État de droit et de la transparence.
Un constat partagé par plusieurs figures publiques dont le Dr Ali Akbar Onanga Y’Obegue, enseignant de droit à l’Université Omar Bongo, qui estime que les accusations portées contre le journaliste « relèvent soit d’une méconnaissance du droit, soit d’une instrumentalisation délibérée de la procédure pénale ».
Le député de la Transition, Marcel Libama, parle quant à lui d’un « recul démocratique inquiétant ». Dans un pays où l’information indépendante peine déjà à respirer, l’incarcération du patron de Gabon Media Time sonne comme un signal glaçant.