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Gabon : Léod Paul Batolo va-t-il surmonter cette nouvelle crise ?

le coup de coeur

La crise sociale qui secoue Comilog n’épargne personne, et surtout pas ses dirigeants. Si Christel Bories, PDG d’Eramet, a tenté de désamorcer la situation depuis Paris dès septembre 2024, sa stratégie aurait apparemment échoué. Son intervention, perçue comme “arrogante et déconnectée des réalités locales” par les syndicats, a renforcé le sentiment que Comilog est gérée depuis la France, au détriment des intérêts gabonais. L’opinion se demandant si son retrait de la direction générale quelques temps après en est une conséquence direct. Dans ce contexte explosif, une question se pose : Léod Paul Batolo, directeur général de Comilog, peut-il encore tenir ?

Une gestion autoritaire

Depuis sa prise de fonction, Batolo a incarné une gestion autoritaire de l’entreprise, refusant de céder aux pressions syndicales et appliquant une politique stricte en matière de rémunération. Mais cette fois, la situation lui échappe. La grève a mis à nu le fossé entre la direction et les travailleurs, et son intransigeance pourrait lui coûter son poste. Dans les cercles du pouvoir gabonais, certains s’interrogent déjà sur la nécessité de le remplacer pour calmer la situation. La déclaration des syndicats au sortir de la médiation de la présidence de la transition est d’ailleurs sans équivoque : « Notre conflit collectif est désormais soumis à la très haute attention de Monsieur le Président de la Transition, Président de la République, Chef de l’État ». 

Une crise sociale, économique et politique

Une phrase qui montre bien que le dossier Comilog a dépassé le simple cadre d’un conflit social pour devenir un enjeu politique majeur. Le ministre du travail, Adrien Nguema Mba est également monté au créneau. Dans un courrier officiel du 7 mars 2025, il rappelait que « la grève, bien qu’un droit constitutionnel, doit respecter les procédures légales », et insistait sur l’obligation du service minimum, conforme à l’article 385 du Code du Travail et au décret n°023/PR/MTEPS du 11 février 2010. « Le déclenchement de la grève sans service minimum ou la violation de celui-ci pourrait constituer une infraction à la loi sociale et exposerait son ou ses auteurs aux sanctions prévues par les textes en vigueur ». Cette prise de position renforce l’idée que le gouvernement veille avant tout à préserver la stabilité économique et à limiter toute forme de paralysie prolongée de l’activité minière.

Le gouvernement pourrait être contraint d’intervenir directement, en exigeant un changement de leadership pour restaurer la confiance.

La crise actuelle n’est donc pas seulement sociale, elle est surtout économique et politique. Le Gabon, qui cherche à renforcer son contrôle sur ses ressources naturelles, ne peut pas se permettre une Comilog instable. Si Batolo ne parvient pas à rétablir l’ordre, le gouvernement pourrait être contraint d’intervenir directement, en exigeant un changement de leadership pour restaurer la confiance et rétablir le dialogue avec les syndicats. 

LIRE AUSSI : Grève à Comilog : 8 milliards de fcfa perdus en 4 jours, un bras de fer aux lourdes conséquences 

Désormais, c’est le Président de la Transition lui-même qui doit trancher : « Vous avez décidé, au piquet de grève du 05 mars 2025, que notre conflit collectif soit désormais soumis à la très haute attention de Monsieur le Président de la Transition, Président de la République Chef de l’Etat. […] Les échanges tenus ce jour avec ces derniers nous donnent un espoir pour une sortie de crise comme nous le souhaitions. » Ces propos, extraits du communiqué du collectif des travailleurs et partenaires sociaux de la Comilog, soulignent bien que l’avenir de la gestion de Comilog ne dépend plus de Batolo ou de Bories, mais bien de l’arbitrage direct du pouvoir central. Eramet, de son côté, est sous pression croissante des investisseurs, qui voient d’un mauvais œil les pertes accumulées et l’impact sur la production mondiale de manganèse. Si la crise s’éternise, la maison mère pourrait être contrainte de modifier son organigramme et de redéfinir sa stratégie au Gabon. 

Une trêve pour redonner une chance au secteur?

Le collectif des travailleurs et partenaires sociaux de la Comilog a décidé d’observer une trêve, histoire de voir où la médiation du gouvernement de transition les mènera. Dans un communiqué datant du 9 mars 2025, ils appellent leurs camarades à la reprise. « En considérant que les discussions vont reprendre sur les instructions de Monsieur le Président de la Transition, Président de la République, du Chef de l’Etat, et conformément aux dispositions de l’article 393 du code du travail, nous vous informons de la suspension de notre mouvement de grève ce lundi 10 mars 2025, à minuit et le travail reprendra au poste. Une communication en assemblée générale vous sera faite après l’audience accordée par le Chef de l’Etat », conclut le communiqué du collectif. 

Avec un chiffre d’affaires de 933 milliards de fcfa, Comilog représente plus de 25% des revenus miniers du Gabon et joue un rôle clé dans l’économie du pays dont elle est là principale entreprise. Quand on sait qu’en 2023, le secteur du manganèse a déjà subi un recul, avec une baisse de la production à 9,97 millions de tonnes (-2,5 %) et une chute du chiffre d’affaires de 27 %, passant de 1 112,7 milliards de fcfa à 812,5 milliards de fcfa. La grève actuelle menace d’aggraver cette tendance, mettant en péril des milliers d’emplois directs et indirects et posant un sérieux risque pour les finances publiques, qui comptaient sur 81,5 milliards de fcfa d’impôts miniers en 2025. Si aucune solution n’est trouvée rapidement, la crise de Comilog pourrait se transformer en un véritable choc économique pour le Gabon, fragilisant encore davantage son équilibre budgétaire et sa crédibilité auprès des investisseurs internationaux.

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