Annoncée avec un certain enthousiasme, l’introduction en bourse de BGFI Holding Corporation (BHC), initialement attendue pour le 30 juillet 2025 à la BVMAC, ne se fera finalement pas comme prévu. Officiellement, le groupe bancaire a annoncé, en accord avec la COSUMAF, la suspension temporaire de l’opération, évoquant des requêtes juridiques introduites par un groupe d’actionnaires devant le Tribunal de Commerce de Libreville. Si l’on se réfère à la communication officielle, il ne s’agit nullement d’un abandon, mais d’une « pause » afin de sécuriser l’environnement réglementaire de l’opération.
Cette suspension intervient dans un climat de tension latente au sein de l’actionnariat. En effet, dès les premières annonces de l’IPO, plusieurs voix, dont celle de l’homme d’affaires Christian Kerangall, s’étaient élevées pour contester le processus, non pas par opposition à l’ouverture du capital en soi, mais face aux modalités retenues. Ce dernier déclarait récemment dans les colonnes de L’Union qu’ « Il n’y a pas de combat ou de lutte, mais une interrogation légitime sur la gouvernance et la transparence des conditions de cette introduction ». Ces réserves semblent désormais produire leurs effets devant les juridictions compétentes.
Alors que cette opération devait marquer un tournant pour le marché financier régional, sa suspension met à mal la dynamique de crédibilité que tente d’impulser la COSUMAF. Le report s’apparente à un revers symbolique pour la place boursière de Douala, qui peine encore à attirer les grandes entreprises de la sous-région. Plus encore, il jette une lumière crue sur l’absence de mécanismes suffisamment robustes pour prévenir les conflits actionnariaux avant les phases de cotation.
Dans sa communication, le groupe bancaire s’efforce néanmoins de rassurer. Il met en avant la solidité de ses performances au 30 juin 2025, en ligne avec les objectifs de son Plan stratégique Dynamique 2025. Il réaffirme également son engagement à aller au bout du processus d’introduction, en annonçant qu’un nouveau calendrier sera très prochainement communiqué. Pour l’instant, la manœuvre vise surtout à préserver l’image de sérieux et de rigueur financière que le groupe cultive depuis plusieurs années.
L’introduction en bourse de BGFI est devenue au fil des semaines un test de maturité institutionnelle pour le secteur financier d’Afrique centrale. Elle interroge autant la capacité des régulateurs à encadrer des transactions sensibles que la volonté des grands groupes à jouer pleinement le jeu de la transparence et de la gouvernance. Suspendue mais pas abandonnée, cette opération reste un thermomètre du climat des affaires dans la sous-région, où la confiance reste fragile, et où les initiatives d’ouverture doivent désormais convaincre au-delà des chiffres.