En 2024, la Société gabonaise de raffinage (Sogara) a affiché un chiffre d’affaires de 716,8 milliards de fcfa, en hausse de 6% par rapport aux 676 milliards engrangés en 2023 selon les données du Tableau de bord de l’économie relayées par nos confrères de Direct Infos Gabon. Une performance qui, de prime abord, témoigne d’une bonne santé commerciale. Pourtant, cette embellie masque mal la fragilité d’un outil industriel vieillissant, incapable de répondre aux besoins croissants du pays et de s’inscrire dans une véritable dynamique de souveraineté énergétique.
Le volume de brut traité a bondi de 36,6% en passant de 666.124 tonnes en 2023 à 910113 tonnes en 2024, porté notamment par le bon fonctionnement du catalyseur. Mais ce sursaut conjoncturel reste tributaire d’un appareil de production qui a montré ses limites, à l’image de l’indisponibilité du bac de brut survenue en fin d’année. Ces pannes récurrentes viennent rappeler qu’en l’absence d’une seconde raffinerie moderne, la Sogara demeure un colosse aux pieds d’argile.
Sur le plan commercial, les signaux sont contrastés. Le marché domestique a enregistré de solides hausses, notamment le butane (+7,8%), le super (+17,1%) et le gasoil moteur (+6,8%). Les exportations, quant à elles, ont profité d’un spectaculaire rebond des ventes de résidu atmosphérique (+44,6%). Mais cette amélioration ponctuelle ne compense pas la dépendance structurelle du Gabon aux importations, qui n’ont reculé que de 4,8%, révélant une vulnérabilité persistante dans l’approvisionnement énergétique.
Les données les plus récentes confirment cette instabilité. Selon la note de conjoncture sectorielle à fin mars 2025, l’indice de production du raffinage de pétrole brut s’est certes amélioré de 117,3% en glissement trimestriel grâce à la reprise des opérations après l’incident de fin 2024. Mais en glissement annuel, la production se contracte de 7,4%. Autrement dit, la Sogara navigue au gré des aléas techniques et conjoncturels, sans perspective claire de consolidation à long terme.Cette situation met en évidence le retard criant du Gabon dans la modernisation de ses infrastructures énergétiques. Tant que le projet d’une seconde raffinerie ne se concrétise pas, l’économie nationale restera exposée aux soubresauts d’un outil productif obsolète. Les 716 milliards de fcfa de chiffre d’affaires de 2024 font illusion, mais la réalité est bien plus préoccupante. Derrière les chiffres flatteurs, c’est tout un secteur stratégique qui continue de tourner à minima, en décalage avec les ambitions affichées de souveraineté et d’industrialisation.