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Gabon: une croissance du PIB qui masque la dépendance au pétrole

le coup de coeur

Entre 2020 et 2024, le PIB du Gabon est passé de 8373 à 12489 milliards fcfa, soit une progression spectaculaire de près de 49%, selon la BEAC. À première vue, ce chiffre traduit un dynamisme économique remarquable, qui pourrait placer le pays dans la catégorie des économies en pleine transformation. Mais derrière cette croissance apparente, des fondamentaux demeurent fragiles.

Le Gabon continue de dépendre essentiellement de ses exportations de pétrole et de manganèse, dont la volatilité conditionne presque mécaniquement ses performances macroéconomiques. Cette dépendance fait de la croissance gabonaise une réalité conjoncturelle et non structurelle étant entendu qu’elle repose sur les prix des matières premières plus que sur la diversification de son appareil productif. Autrement dit, le pays s’expose à des cycles d’euphorie et de crise, déjà observés dans son histoire économique récente.

La comparaison régionale renforce ce constat. Le Cameroun, avec un PIB supérieur à 28 000 milliards de fcfa, reste l’incontestable locomotive de la CEMAC, grâce à un tissu productif plus diversifié alliant agriculture, agro-industrie, services financiers et un secteur manufacturier embryonnaire mais existant. La Guinée équatoriale, avec environ 13 000 milliards de fcfa, talonne le Gabon grâce à sa rente pétrolière, tandis que le Congo se situe autour de 10000 milliards de fcfa, lourdement affaibli par sa dette. Le Tchad, avec 7500 milliards de fcfa, et la Centrafrique, en dessous de 3000 milliards de fcfa, restent loin derrière. 

Dans ce paysage, le Gabon occupe une place intermédiaire, ni géant ni petit, mais dépendant comme ses pairs des hydrocarbures. Sa progression impressionne, mais elle n’efface pas son manque de diversification face à des économies comme celle du Cameroun, qui amortissent mieux les chocs extérieurs. Cette réalité pose un problème de cohérence entre les chiffres et la vie quotidienne. 

Par ailleurs, la croissance du PIB ne se traduit pas de manière significative dans le niveau de vie des Gabonais. Les inégalités persistent, le chômage des jeunes reste élevé et la dépendance aux importations alimentaires pèse lourdement sur le pouvoir d’achat. Cette augmentation des richesses n’a donc pas suffi à transformer la structure sociale du pays.

Au contraire, elle a renforcé une dualité entre l’économie formelle dominée par les hydrocarbures et quelques grands groupes, et un secteur informel qui concentre la majorité des emplois et des activités de survie. C’est cette fracture qui empêche la croissance gabonaise de se traduire en véritable développement. En outre, la vulnérabilité aux cycles mondiaux fragilise l’État et ses finances publiques.

En cas de chute du baril ou du manganèse, les recettes budgétaires diminuent, entraînant des retards dans les paiements, un recours accru à l’endettement et une contraction brutale de la croissance. À terme, la question est de savoir si le Gabon souhaite continuer sur cette trajectoire ou enclencher une transformation plus profonde. Les zones économiques spéciales, le développement de l’agro-industrie et la valorisation locale du bois représentent des pistes prometteuses, mais elles restent marginales dans le PIB.

Sans une stratégie claire et soutenue de diversification, la croissance restera fragile et dépendante des aléas mondiaux. Les 12489 milliards de 2024 sont une réussite statistique certes, mais ils n’apportent pas encore la preuve d’un développement solide.

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