La production nationale de manganèse a progressé de 20% au premier trimestre 2025 par rapport au trimestre précédent, atteignant près de 2,7 millions de tonnes, contre 2,25 millions de tonnes en fin 2024 selon la dernière note de conjoncture sectorielle. Ce redressement traduit le regain de demande mondiale, stimulé par une hausse de 1% de la production d’acier au carbone en Chine et de 8% en Inde, deux marchés clés pour le minerai gabonais. Le Gabon reste le deuxième producteur mondial de manganèse, avec environ 15% des parts de marché.
Cependant, la comparaison en glissement annuel est moins flatteuse avec une production qui a reculé de -6,9%, soit une perte d’environ 200000 tonnes par rapport au premier trimestre 2024. Les séquelles logistiques de la fin de l’année 2024 pèsent encore puisque la congestion chronique du port d’Owendo, l’insuffisance des installations de stockage et les grèves successives ont ralenti les expéditions. Le fret ferroviaire, principale voie d’évacuation, a enregistré des hausses tarifaires de près de 18% fin 2024, ce qui a mécaniquement accru les coûts de la filière.
Cette vulnérabilité logistique limite l’effet positif de la demande mondiale. Sur la période, les cours du manganèse se sont stabilisés autour de 5,2 dollars/dmtu, un niveau qui devrait profiter au Gabon. Mais l’incapacité à acheminer les volumes compromet une partie des recettes d’exportation. En termes financiers, la baisse de 200000 tonnes équivaut à une perte potentielle de 65 millions de dollars, soit près de 40 milliards de fcfa de manque à gagner pour la balance commerciale.
Le document de cadrage mettait déjà clairement en avant la filière minière comme un axe stratégique de diversification économique. Il rappelle que le manganèse représentait en 2024 près de 30% des exportations gabonaises hors pétrole. La Banque mondiale, de son côté, souligne dans son dernier rapport pays que les goulets d’étranglement logistiques coûtent chaque année environ 1,5 point de croissance au Gabon, en particulier dans les mines et le bois. Les données du premier trimestre 2025 confirment ce diagnostic et la nécessité d’investissements massifs dans les infrastructures portuaires et ferroviaires.
À moyen terme, le véritable enjeu réside dans la transformation locale. Actuellement, moins de 10% de la production de manganèse est valorisée au Gabon, le reste étant exporté brut. La stratégie nationale prévoit pourtant d’atteindre 30% d’ici 2030, objectif qui nécessite des partenariats industriels solides et une énergie plus fiable. Sans avancée rapide sur ces deux volets, le rebond observé début 2025 restera fragile et dépendant d’un contexte international sur lequel le pays n’a que peu de prise.