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Projet constitutionnel gabonais : le retour du service militaire, volonté de défendre la patrie ou militarisation de la jeunesse? 

le coup de coeur

L’article 27 du chapitre 2 des devoirs du citoyen marque en quelque sorte, un tournant important dans la manière dont le Gabon envisage la participation de ses jeunes à la défense nationale. En stipulant que «chaque citoyen a le devoir de défendre la patrie» et que «le service militaire est obligatoire pour les Gabonais des deux sexes, dans les conditions fixées par la loi», la nouvelle Constitution semble établir une sorte de militarisation générale de la société. Sous couvert du devoir de protéger la nation, ce service obligatoire pourrait être perçu comme une volonté des autorités de renforcer le contrôle sur la population en temps de paix, en intégrant les jeunes dans un système de défense potentiellement au service d’un pouvoir centralisé.

Il est indéniable que ce service militaire pourrait présenter certains avantages. En effet, le service militaire se définit comme la réquisition par l’État d’une partie de ses citoyens à des fins militaires. En plus d’inculquer aux jeunes des compétences pratiques telles que le maniement des armes, il pourrait aussi favoriser l’unité nationale, renforcer le patriotisme et offrir une formation disciplinaire utile dans d’autres secteurs de la société. De nombreux pays ont vu leur cohésion sociale se renforcer grâce à des programmes similaires, et la formation militaire peut inculquer des valeurs de responsabilité, de solidarité et de respect des institutions.

Militarisation ou citoyenneté ?

Cependant, cette obligation intervient dans un contexte où le Gabon compte déjà des milliers de militaires en service, un effectif considérable par rapport à la taille de la population. Selon la loi de finances 2024, les personnels de la défense nationale et de la sécurité répertoriés seraient à plus de 42 000 individus, soit 32 089 pour la défense et 10 242 pour le personnel du ministère de l’Intérieur. Pourtant, cela n’a pas empêché une montée inquiétante de l’insécurité dans plusieurs régions du pays, ni une persistance des problèmes de gouvernance et de respect des lois de la République. 

Comment alors justifier un tel renforcement militaire quand les forces déjà présentes peinent à enrayer l’instabilité et l’inefficacité institutionnelle ? Est-ce que l’ajout de nouveaux contingents suffira à résoudre ces défis, ou risque-t-on de voir une militarisation accrue sans impact tangible sur la sécurité et le respect des lois ? 

Patriotisme et devoir citoyen

Le choix d’imposer un service militaire obligatoire pour tous les jeunes Gabonais, hommes et femmes, soulève également des interrogations quant aux véritables motivations derrière cette décision. Sous couvert de patriotisme et de devoir citoyen, ce retour possible du service militaire pourrait devenir un outil de contrôle social, encadrant la jeunesse dans une discipline rigide et une obéissance aux autorités. Aux États-Unis, la conscription (service militaire obligatoire) à été aboli en 1973 pour un service volontaire, tandis qu’en France, il a été supprimé en 1996 par  Jacques Chirac. Par ailleurs, en France, Emmanuel Macron le ressuscite lors de la campagne présidentielle de 2017. Il est soumis à étude et fait l’objet d’un rapport remis le 26 avril 2018. Le rapport souligne « des difficultés non négligeables » et un coût de « quelques milliards d’euros », et plaide pour un déploiement sur sept ans.

Alors que le Gabon continue de faire face à des problèmes de sécurité, d’inégalités et de gouvernance, il reste à savoir si ce service apportera réellement les bienfaits escomptés, ou s’il participera davantage à une militarisation de la société sous l’apparence d’un projet national.

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