La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a récemment procédé à une distribution historique de dividendes à ses six pays membres, totalisant 100,37 milliards FCFA (environ 173 millions de dollars). Ce virement, qui s’inscrit dans le cadre des résultats de l’exercice 2024, témoigne d’une performance financière solide de l’institution monétaire régionale, malgré un contexte économique encore marqué par des incertitudes géopolitiques et les séquelles post-Covid. C’est un signal fort en faveur de la stabilité financière de la sous-région.
La répartition de cette enveloppe s’est faite selon les critères statutaires internes à la BEAC, qui tiennent compte de la circulation fiduciaire dans chaque pays, mais aussi de la contribution relative de chaque État au résultat net de la banque centrale. Le Cameroun, en tant que première économie de la CEMAC, a reçu la part la plus importante, suivi du Gabon, du Congo et des autres membres. Cette méthodologie vise à assurer une redistribution équitable, tout en incitant les États à maintenir une discipline macroéconomique.
Cette distribution de dividendes revêt une importance particulière pour les finances publiques des pays concernés. Elle représente une source non négligeable de liquidités à l’heure où plusieurs États de la CEMAC sont confrontés à des besoins de financement croissants, notamment en lien avec les réformes structurelles appuyées par le FMI. Pour certains gouvernements, cet apport peut contribuer à atténuer la pression sur le déficit budgétaire ou à financer des projets prioritaires dans des secteurs tels que la santé, l’éducation ou les infrastructures.
Ce dividende exceptionnel intervient également dans un contexte de consolidation du rôle de la BEAC en tant que garant de la stabilité monétaire régionale. Depuis la mise en œuvre des réformes engagées en 2017, la banque centrale a renforcé ses dispositifs de supervision bancaire, amélioré la transparence de ses comptes et assaini sa gestion. Le résultat net positif enregistré en 2024 est donc le fruit de cette gouvernance plus rigoureuse, combinée à la reprise progressive des activités économiques dans la sous-région.
A noter que cette manne financière pourrait avoir un effet d’entraînement sur les économies nationales, si elle est judicieusement utilisée. Les observateurs soulignent néanmoins la nécessité, pour les États membres, de l’affecter de manière stratégique, notamment pour stimuler l’investissement productif et soutenir les filets sociaux. Car, au-delà de la conjoncture, les défis structurels de la CEMAC restent nombreux : dépendance aux matières premières, faible diversification, vulnérabilité budgétaire. La BEAC, en redistribuant ses gains, joue son rôle de catalyseur, mais la balle reste dans le camp des gouvernements nationaux.