C’est un vieux refrain de la gouvernance gabonaise : la décentralisation. Annoncée depuis près de trois décennies, promise par tous les régimes successifs, elle revient aujourd’hui au centre du jeu institutionnel. Cette fois, c’est le président Brice Clotaire Oligui Nguema lui-même qui met le sujet sur la table, en présidant l’ouverture de la première réunion de la Commission nationale de la décentralisation (CND). De quoi raviver l’espoir d’un tournant réel, même si les Gabonais ont déjà vu passer bien des déclarations sans lendemain.
L’enjeu est simple : faire en sorte que les communes et départements ne soient plus de simples vitrines administratives, mais de véritables centres de décision et de services publics. Pour cela, le gouvernement annonce un transfert progressif de compétences de 12 ministères vers les collectivités locales. Mais la vraie question est : ce transfert sera-t-il accompagné des moyens humains, techniques et financiers nécessaires ?
La rencontre du 17 juin n’était pas qu’un exercice symbolique. Le gouvernement a validé un Plan national de transfert des compétences, fruit des travaux du Comité technique de février et mars. Les ministres concernés devront mettre en œuvre des mesures concrètes dans leurs départements respectifs. Mais il reste un chaînon manquant de taille : le calendrier d’exécution. À quand la bascule effective sur le terrain ? Et qui sera chargé de contrôler son avancement ?
Les collectivités locales, de leurs côtés, sont loin d’être prêtes. Nombre d’entre elles souffrent d’un sous-équipement chronique, d’un manque criant de cadres formés et d’une dépendance financière totale à l’État central. Même le Fonds de péréquation, censé garantir l’équité budgétaire entre territoires riches et pauvres, n’a pas encore de directoire opérationnel. Le chantier est donc immense et hautement politique.
En l’absence d’un engagement suivi et de mécanismes contraignants, cette relance de la décentralisation pourrait bien n’être qu’un écran de fumée de plus malgré la volonté affichée du président Oligui Nguéma. Pour que cette réforme soit crédible, elle devra être portée au plus haut niveau, traduite dans le budget national, et assortie d’un calendrier clair. Faute de quoi, la fameuse “proximité de l’État” restera un slogan. Wait and see.