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Gabon : bitumage de la route Alembe–Mikouyi, symbole d’un double enjeu 

le coup de coeur

Ce 28 juin 2025 à Libreville, c’est bien plus qu’un contrat routier qui a été signé. Sous l’impulsion directe du président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguéma, l’État gabonais, l’entreprise Portéo BTP et BGFIBank ont scellé une convention de financement d’un montant colossal de 140 milliards de fcfa. En ligne de mire : le bitumage intégral de la route Alembe–Mikouyi entre le Moyen-Ogooué et l’Ogooué-Ivindo, un axe stratégique de près de 300 km, considéré comme l’un des plus structurants du mandat en cours. Et c’est Henri-Claude Oyima, patron de BGFI et désormais ministre de l’Économie, qui porte la double casquette d’exécutant et de financier, dans un équilibre de plus en plus délicat.

Ce chantier titanesque et important pour l’économie gabonaise, démarré simultanément aux deux extrémités de l’axe, ambitionne de désenclaver toute une frange orientale du pays, en mettant en valeur des provinces rurales jusqu’ici délaissées par la grande mécanique de l’État. À terme, cette route devrait fluidifier les échanges interprovinciaux, renforcer l’accès aux marchés agricoles et services publics, et créer plusieurs milliers d’emplois et un retour dans les nombreux villages vidés de leurs habitants par manque d’opportunités économiques, dont le village Junckville (Bangagnet). Signe de l’importance accordée à l’ouvrage, sa réalisation bénéficie d’un dispositif de supervision renforcé par le ministère des Infrastructures, dans un pays où la voirie rime souvent avec retard, surfacturation et malfaçons.

À terme, cette route devrait fluidifier les échanges interprovinciaux, renforcer l’accès aux marchés agricoles et services publics. © D.R.

Mais derrière les sourires de façade, un jeu de force se devine. Et pour cause, ce projet cristallise aussi une lecture politique plus insidieuse : le rapprochement stratégique entre le président et le tycoon Oyima, dans une relation où chacun semble tester les limites de l’autre. En consentant à ce financement massif via BGFIBank, Oyima donne des gages de loyauté et accompagne le projet présidentiel. Mais il prend aussi un risque financier substantiel, dans un contexte où la soutenabilité de la dette intérieure interroge et où la rentabilité des prêts bancaires à long terme reste incertaine. L’opacité sur les modalités du prêt (taux d’intérêt, garanties, échéances) n’a d’ailleurs pas manqué d’attiser les critiques de certains analystes.

Le bitumage de la route Alembe–Mikouyi devient donc le symbole d’un double enjeu, dont le plus important est la transformation physique du pays par les infrastructures. © D.R.

Le bitumage de la route Alembe–Mikouyi devient donc le symbole d’un double enjeu : la transformation physique du pays par les infrastructures, et la transformation silencieuse de ses rapports de pouvoir. A noter que cette route traverse des zones écologiquement sensibles, comme le parc national de la Lopé, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. En injectant autant de ressources dans les routes, Oligui Nguéma veut inscrire son action dans la durée.

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