D’après nos confrères de Gabonreview, le Gabon a récemment cédé, via la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), les 35% de parts qu’il détenait dans Rougier International Afrique au groupe pétrolier franco-britannique Perenco. Cette annonce intervient alors même que le gouvernement gabonais communiquait en grande pompe sur la renationalisation de la Société nationale des bois du Gabon (SNBG).
Vente de participation
Alors que cette dernière opération avait été présentée comme un signal fort d’une reprise en main des ressources forestières du pays, la vente de la participation étatique dans Rougier semble aller dans la direction inverse, semant le doute sur la cohérence de la stratégie économique au sommet de l’État. D’autant que cette cession s’est faite dans une opacité totale : aucun chiffre n’a été communiqué quant au montant de la transaction.
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Cette absence de transparence sur une opération d’une telle ampleur ne peut qu’alimenter les interrogations, d’autant plus que Rougier International Afrique exploite près de 895 000 hectares de forêts et commercialise environ 300 000 m³ de grumes par an. Quelle est la logique qui pousse l’État à reprendre le contrôle d’un acteur public d’un côté, tout en se retirant d’un exploitant forestier majeur de l’autre ?
Le choix de Perenco comme repreneur
Par ailleurs, le choix de Perenco comme repreneur ne manque pas non plus d’étonner. Acteur incontournable du secteur pétrolier, le groupe n’a pourtant aucune expérience dans la gestion durable des forêts. Son bilan environnemental dans l’industrie pétrolière est loin de faire l’unanimité, et l’on peut légitimement s’interroger sur sa capacité à gérer des ressources aussi sensibles que les forêts gabonaises.
Rougier, malgré ses propres limites, avait l’expertise et les certifications nécessaires pour garantir une exploitation encadrée et conforme aux standards internationaux. Avec cette vente, le Gabon prend-il le risque de voir une exploitation forestière plus agressive et moins respectueuse des normes environnementales ?
Quoi qu’il en soit, cette opération soulève une question fondamentale : quelle est la ligne directrice de la politique forestière du Gabon ? Le pays affiche des ambitions fortes en matière de crédits carbone et de valorisation durable de ses forêts, mais ces choix économiques parfois contradictoires brouillent le message envoyé aux investisseurs et aux acteurs du secteur. En l’absence d’explication claire de la part des autorités, cette cession pourrait être perçue comme un signal de faiblesse plutôt que comme une décision stratégique maîtrisée.