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Gabon: que vaut réellement l’article 23 du projet de nouvelle Constitution?

le coup de coeur

L’un des aspects fondamentaux de la révision constitutionnelle est l’introduction de l’obligation de garantir un salaire équitable pour tous les travailleurs, inscrit dans la Constitution sous la forme d’une exigence de rémunération au minimum au SMIG. Cette mesure défendue bec et ongle notamment par l’un des vice-présidents de l’Assemblée nationale, Geoffroy Foumboula Libeka Makosso, vise à formaliser les conditions de travail au Gabon, en particulier dans un contexte où une grande partie de la population évolue dans le secteur informel. Historiquement, un nombre important de Gabonais, en particulier dans les secteurs comme l’artisanat, la sécurité, le ménage ou les petits commerces, n’ont pas bénéficié de rémunérations fixées par des règles claires et ont été souvent privés de protections sociales élémentaires. L’article 23 pourrait donc être une réponse, mais l’absence de précisions pourrait s’avérer perturbante. 

L’un des arguments phares des partisans du «Oui» repose sur le fait que cette mesure pourrait réduire les inégalités sociales et économiques créées par l’absence de régulation salariale. En effet, selon certaines estimations, près de 60% des travailleurs gabonais sont employés dans l’économie informelle, où les conditions de travail sont précaires, sans couverture sociale ni garanties de rémunération. Inscrire dans la Constitution le droit à un salaire équitable pourrait donc avoir un impact direct sur ces travailleurs, en les protégeant contre les abus et en les encourageant à entrer dans le circuit formel de l’économie.

Nécessité de reduire l’informalité?

Cette obligation constitutionnelle a pour but de réduire l’informalité qui, bien que constitutive d’une grande part de l’économie nationale, est également synonyme d’instabilité et de précarité pour ses acteurs. En garantissant un salaire décent et l’obligation de déclaration à la CNSS, la réforme vise à encourager les travailleurs informels à s’enregistrer et à bénéficier des avantages sociaux liés au travail formel. Cela pourrait offrir une meilleure couverture sociale, notamment en matière de retraite, de soins de santé et de sécurité en cas d’accident du travail, des protections dont beaucoup de travailleurs informels sont privés aujourd’hui.

Renforcer l’économie formelle

L’impact attendu de cette réforme va donc au-delà de la simple protection des travailleurs. Il s’agit aussi de renforcer l’économie formelle du Gabon. En incitant les travailleurs du secteur informel à régulariser leur situation, le pays pourrait générer davantage de recettes fiscales et sociales, essentielles pour financer les services publics et soutenir les politiques de développement. Cela pourrait également renforcer la compétitivité de l’économie gabonaise en la rendant plus transparente et en offrant des conditions de travail plus équitables pour tous.

Quid des mécanismes d’accompagnement ?

Cependant, cette réforme s’accompagne de défis majeurs, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre pratique. Dans un pays où l’économie informelle est aussi ancrée, la simple obligation légale d’un salaire minimum ne suffira pas à elle seule. Il sera nécessaire de déployer des mécanismes d’accompagnement pour aider les employeurs du secteur informel à s’adapter, comme la création de dispositifs simplifiés de déclaration, des campagnes de sensibilisation, et des incitations à l’adhésion à la CNSS. Sans un accompagnement renforcé, le risque est que cette mesure n’atteigne pas son objectif de formalisation de l’économie, et que les travailleurs restent exclus du bénéfice de cette réforme.

Les partisans du « Oui » soutiennent que cette disposition permettra de poser les bases d’une société plus juste et plus équitable, où tous les travailleurs, qu’ils soient dans l’informel ou le formel, jouiront des mêmes droits fondamentaux, notamment celui d’un salaire décent et d’une couverture sociale. Certes, cela représente une avancée significative pour l’amélioration des conditions de travail des Gabonais, cependant, le fait que la mention «l’Etat garantit» ne soit pas indiquée, peut poser un problème de légitimité et semer le doute quant à une forme d’irresponsabilité, puisqu’une simple interprétation peut retirer “l’obligation” de l’État. 

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