À défaut d’actes, les mots. Depuis sa prise de pouvoir le 30 août 2023, le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) s’est livré à une avalanche de promesses : lutte contre la corruption, restauration de l’État, transparence dans la gestion publique. Mais à en croire les données les plus récentes, notamment celles du Mo Ibrahim Index 2024, la transition gabonaise brille surtout par son échec à tenir parole.
Une administration engluée dans des pratiques opaques
Selon cet indice de référence en Afrique, le Gabon affiche un score abyssal de 25 sur 100 sur l’indicateur « Absence de corruption dans le secteur public« . Un résultat qui tranche violemment avec les proclamations d’éthique et de rupture. À titre de comparaison, le Botswana caracole à 71/100, le Sénégal atteint 60/100, et même des pays sortis de conflits font mieux. Ce chiffre met à nu une administration encore engluée dans les pratiques opaques, les passe-droits, et les logiques de rente de l’ancien régime dirigé par Ali Bongo Ondimba.
Derrière ce score pour le moins mitigé, une réalité connue de tous : les mécanismes de contrôle ne fonctionnent pas. Ni l’Inspection générale d’État, ni la Cour des comptes, ni même la Commission nationale de lutte contre l’enrichissement illicite, ne semblent exercer un pouvoir réel sur les gestionnaires publics. Les audits sont rares et quand ils sont menés on ne tient que trop peu compte de leurs recommandations, les sanctions inexistantes, et les dérives se poursuivent en toute impunité. L’opacité budgétaire est totale, les dépenses se décident en vase clos, et les projets dits prioritaires échappent à toute évaluation publique.
Un système verrouillé
La situation est d’autant plus préoccupante que la presse d’investigation reste muselée, ou à défaut privée d’accès à l’information. Les journalistes qui tentent de faire leur travail font face à des pressions ou au silence glacial des institutions. La rédaction d’Inside News241 detient de nombreux accusés de réception de courriers déposés auprès de nombreuses entités, dont la Cour des Comptes, sans avoir obtenu le moindre rendez-vous. Quant aux organisations de la société civile, elles peinent à jouer leur rôle, faute de moyens et de soutien politique. La plupart d’entres elles jouent d’ailleurs désormais le jeu du nouveau régime.
Le CTRI a beau vanter une prétendue moralisation de la vie publique, les faits le trahissent. Le système reste verrouillé, les acteurs de l’ancienne gouvernance toujours en place, et le peuple gabonais, lui, continue de subir les effets d’une gouvernance sans comptes à rendre. Ce n’est pas une rupture que le Gabon connaît sous la transition, c’est un recyclage des pratiques les plus néfastes de l’ère Bongo.