C’est bien plus que le PIB du Gabon que s’apprête à investir l’Empire du milieu au Nigeria. En annonçant 20 milliards de dollars d’investissements, la Chine choisit un partenaire capable d’absorber massivement capitaux, savoir-faire industriel et transferts technologiques. Derrière cette nouvelle offensive, on retrouve une même ambition, accompagner les puissances africaines qui affichent une ambition industrielle assumée. Le Nigeria, fort de sa population, de son marché intérieur et de sa volonté politique, coche toutes les cases.
Pendant ce temps, le Gabon peine à formaliser une stratégie de partenariat économique à long terme. La Chine ne se contente plus de commercer avec l’Afrique. Elle y investit massivement, choisissant ses partenaires avec stratégie. Dernier en date : le Nigeria. À travers le Partenariat stratégique Nigeria-Chine (NCSP), des entreprises chinoises ont promis, le 18 juillet 2025, de mobiliser plus de 20 milliards de dollars dans des secteurs clés comme l’agriculture, l’automobile, les mines, l’acier et l’énergie. Des engagements concrets, issus de récentes missions à Pékin, selon Joseph Olasunkanmi Tegbe, directeur général du NCSP.
L’objectif est limpide : relancer l’industrialisation du Nigeria, asseoir sa sécurité alimentaire et générer de l’emploi sur tout le territoire. Des projets qui démarrent dès cette année, preuve que la coopération sino-nigériane ne se limite pas aux promesses de forum, mais se décline en plans d’action, en usines et en transferts de technologie. Alors que le Nigeria se déploie, au Gabon, les financements chinois restent morcelés, souvent limités à des projets d’extraction ou d’infrastructures isolées, sans effet structurant sur la transformation locale ni sur l’emploi.
La différence ne tient pas au volume des ressources naturelles, mais à la clarté de la vision nationale. Le NCSP est l’un des outils mis en place dans le cadre du Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC). Sa particularité : il mise sur une logique de codéveloppement industriel et non plus seulement sur des prêts ou des infrastructures clés en main. Il vise également à ouvrir le marché chinois aux produits transformés nigérians, afin d’inverser la dépendance aux matières premières brutes.
Le contraste avec le Gabon est saisissant. Si Libreville bénéficie également de la présence chinoise dans les mines ou le bois, l’approche reste fragmentée et centrée sur l’extraction. Il n’existe à ce jour aucune plateforme bilatérale gabono-chinoise structurée sur le modèle du NCSP, ni de stratégie intégrée pour mobiliser les financements chinois au service d’une réelle transformation locale.
Alors que le Nigeria développe ses chaînes de valeur autour de l’acier, de l’agroalimentaire ou de l’électromobilité, le Gabon continue d’exporter du manganèse brut, du pétrole à peine stabilisé, et du bois peu transformé. Une trajectoire qui, sans réajustement, creusera encore l’écart entre les pays moteurs du continent et ceux qui campent dans une économie rentière sous perfusion.