La Compagnie nationale de navigation intérieure et internationale (CNNII Gabon) a officialisé, le 20 août 2025, la rupture de son partenariat avec le groupe burkinabè EBOMAF. Dans un communiqué, l’entreprise publique explique que cette décision, prise après une évaluation conjointe, s’inscrit « dans une volonté mutuelle de réorienter les priorités stratégiques de chaque entité, dans le respect des engagements passés ». Elle précise également que « cette évolution n’affectera en rien la continuité de ses activités, ni la qualité des services rendus au public », ajoutant qu’elle demeure « pleinement engagée dans sa mission de développement du transport fluvial, maritime et logistique au Gabon ».
À l’origine, le partenariat entre l’État gabonais et EBOMAF reposait sur une convention de concession visant à relancer durablement la CNNII. Le groupe burkinabè devait obtenir l’exploitation de plusieurs activités traditionnellement assurées par la compagnie publique, à condition que l’État procède à l’apurement des dettes sociales, au transfert de titres fonciers et à la mise en œuvre d’un plan social. Mais selon EBOMAF, la réalité sur le terrain ne correspondait pas aux engagements pris : les sites promis ne relevaient pas de la propriété de l’État, mais d’acteurs privés, compliquant l’exercice de la « plénitude des activités concédées ».
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Dans ce contexte déjà tendu, la situation financière de la CNNII est venue assombrir le partenariat. EBOMAF affirme que les recettes étaient insuffisantes pour couvrir les charges courantes et que les comptes de la compagnie faisaient l’objet de multiples saisies judiciaires. Face à cela, le groupe aurait décidé de placer les recettes dans un compte séquestre pour garantir le fonctionnement minimal de la société. Une décision controversée, qui interroge sur le manque d’encadrement de l’État et sur la transparence de la gestion des flux financiers dans cette période critique.
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La direction de la CNNII est également devenue un foyer de tensions. EBOMAF nie avoir écarté le directeur général, tout en l’accusant de passivité. Le flou persiste, d’autant que ce DG aurait été désigné par EBOMAF lui-même pour faciliter la transition. Entre accusations croisées et responsabilités mal définies, la gestion du partenariat a davantage alimenté la méfiance qu’elle n’a consolidé la relance attendue. Le personnel et les observateurs extérieurs ont vu s’installer un climat de défiance, renforcé par l’opacité de certaines décisions.
Finalement, le partenariat a viré au divorce. Si la CNNII salue la collaboration passée avec EBOMAF et réaffirme son engagement à « poursuivre ses projets de modernisation, dans le respect des normes, des attentes des usagers et de la stratégie nationale », le groupe burkinabè dénonce un engrenage d’incompréhensions et de blocages. Pour certains observateurs, l’opération relevait d’un « bluff » où chaque partie cherchait à tirer parti de l’autre sans assumer pleinement ses responsabilités. Entre ambitions contrariées, dettes persistantes et gouvernance opaque, la rupture officialisée en août 2025 marque la fin d’un partenariat stratégique qui, sur le papier, devait incarner une nouvelle ère pour le transport fluvial au Gabon.