Habitué à faire usage de sa verve sur la scène nationale, Alain-Claude Bilie-By-Nze est un orateur talentueux doté d’une expérience politique de près de trois décennies. Durant ces années, il a côtoyé le clan Bongo en étant dans l’escarcelle du pouvoir. Devenu l’un des opposants à la Transition politique depuis le coup d’État du 30 août 2023, il ne manque plus une occasion de remettre en cause la gestion du pays par le Comité pour la transition et la restauration des institutions ( CTRI). C’est son droit le plus absolu en tant que citoyen de ce pays. Dans une interview accordée à une chaîne télévisée internationale, l’ex-Premier ministre du régime déchu a remis une couche sur la gestion du pays par Oligui Nguema depuis sa prise du pouvoir.
Bilie-By-Nze ou le choix de la déraison ?
Tandis que la fin de la Transition politique entamée il y a deux ans approche avec l’organisation d’une élection présidentielle le 12 avril prochain, rien ne s’est encore dessiné du point de vue des candidats. Du côté du bord de mer comme dans la plupart des QG politiques, les stratégies se peaufinent en coulisse et chacun se réserve le droit de l’effet de surprise. En attendant, un duel à distance semble prendre forme entre deux personnalités bien connues des Gabonais : Alain-Claude Bilie-By-Nze et Brice Clotaire Oligui Nguema, par ailleurs président de la Transition.
Cette rivalité épique débute quelques mois plus tôt lorsqu’après avoir observé un temps de retraite politique faisant suite au renversement du pouvoir de l’époque, l’ex-Premier ministre d’Ali Bongo a commis un ouvrage “Awu mawu” à charge contre le CTRI et son leader Brice Clotaire Oligui Nguema. S’en est suivi la création du mouvement “Ensemble pour le Gabon”, regroupant certains anciens hauts responsables de l’administration publique gabonaise autour de lui. Depuis, l’ex-cacique du PDG ne se prive plus de pilonner les militaires au pouvoir jugeant avec catastrophisme les réalisations accomplies jusque-là.

Si la stratégie semble contraire dans le camp d’Oligui Nguema qui opte pour le silence, choisissant de mener à bon port le chronogramme transitionnel, Alain-Claude Bilie-By-Nze excelle dans la surenchère politique avec plusieurs sorties médiatiques aussi piquantes les unes que les autres. Dans une récente déclaration, il annonçait les couleurs. « J’ai servi le père, le fils mais je ne servirai pas l’aide-camp », a-t-il déclaré en faisant allusion à l’éventuelle candidature d’Oligui Nguema aux futures joutes présidentielles. Chose étonnante, la communication présidentielle a choisi de ne pas répondre à ses propos aussi condescendants que graves prononcés contre un Chef d’État.
ACBBN, pourquoi Oligui Nguema laisse faire ?
Depuis son opération de retour en politique, Alain-Claude Bilie-By-Nze occupe l’espace avec brio. Cela est dû sans doute au vide communicationnel laissé par le CTRI depuis son arrivée au pouvoir et tous les autres leaders politiques qui ont choisi de se rallier au camp au pouvoir. De ce constat fait par de nombreux observateurs politiques gabonais découle pourtant une flagrante évidence : ACBBN se taille une rédemption politique insidieuse et se hisse facilement dans les sommets de l’arène politique. Qui aurait cru qu’une frange populaire légitimerait le discours d’un homme pourtant conspué le long des parvis de la Présidence lors de la prestation de serment d’Oligui Nguema un peu plus de 15 mois après son éviction des affaires publiques ?
Pourtant, en dépit de toutes ses salissures politiques et des copulations idéologiques ignominieuses en faveur des dérives de la «Young team» qu’il servait en tant que Premier ministre, l’homme reste serein. Après ses fulgurances politiques dans les hautes sphères de l’État à l’ère de l’ancien régime, il n’hésite pas à s’appuyer sur l’accoudoir du vide de stratégie de communication des militaires, se donner le rôle de l’opposant providentiel à Oligui Nguema. Bilie-By-Nze, stoïque, reste droit dans ses bottes. Rien ne semble jusque-là l’ébranlé politiquement.
Pour satisfaire son appétit insatiable de communicant, il avait même osé défier publiquement le trio de l’exécutif (Oligui Nguema-Ndong Sima et Barro Chambrier) en l’invitant à un débat télévisé quelques jours seulement avant la date du référendum constitutionnel en novembre 2024. De même qu’à plusieurs reprises, il a fait savoir que l’actuelle Transition est une parodie et que les acteurs qui l’ont conduite sont des « Pédégistes en treillis militaires ». Selon lui : « à part l’absence d’Ali Bongo, les visages à la Présidence sont restés les mêmes et le mode de gouvernance n’a pas changé […] ».
ACBBN : ce que pense le peuple !
Le positionnement actuel de la Présidence de la Transition sur les sorties médiatiques d’Alain-Claude Bilie-By-Nze irrite une majeure partie de la population gabonaise. Son excès de confiance et ses certitudes engrangées face à l’immobilisme de l’exécutif mettent à mal les espoirs du renouvellement de la classe politique. Le peuple accuse la classe dirigeante actuelle d’un laxisme dans la communication pour rappeler à l’ordre cet ex-Premier ministre comptable de la gestion opaque du pays sous le magistère d’Ali Bongo Ondimba.
Sur les réseaux sociaux, nombreux tentent comme ils peuvent de répondre aux déclarations empreintes de provocation de l’un des meilleurs porte-paroles que les gouvernements pédégistes n’ont jamais eu. Pour certains, Bilie-By-Nze ne mérite pas cette tribune d’expression, quand pour d’autres, il mériterait d’avoir en face de vrais contradicteurs.