L’annonce du lancement officiel de la « Ville verte de la baie de la Mondah » au Cap Estérias marque un nouveau tournant dans la stratégie de transformation urbaine du Gabon. Porté par des investisseurs chinois, ce projet futuriste, au coût estimé à 2500 milliards de fcfa, sera déployé sur une période de sept ans. Rapporté à cette échéance, ce sont en moyenne plus de 357 milliards de fcfa qui devront être mobilisés chaque année. Un montant colossal équivalent à plus de 10% des recettes budgétaires annuelles de l’État gabonais.
Présenté comme un futur pôle de croissance intégré, le projet est structuré autour de cinq composantes clés. La zone résidentielle promet d’accueillir des logements modernes à destination des familles et des travailleurs, tandis qu’un quartier d’affaires devrait offrir des espaces adaptés aux besoins des entreprises, de l’administration et des investisseurs. Le défi sera non seulement de construire ces infrastructures, mais aussi de garantir leur accessibilité financière et leur intégration aux besoins sociaux locaux.
La dimension touristique et technologique n’est pas en reste. Un pôle hôtelier viendra soutenir les flux liés au tourisme et aux missions économiques, avec un accent mis sur les standards durables. Parallèlement, une zone semi-industrielle abritera un data center, infrastructure stratégique dans un pays où les ambitions numériques ne cessent de croître, mais où les investissements restent encore marginaux. La question du financement durable de ces équipements reste cependant posée.
L’espace industriel prévu complétera l’ensemble, avec la création d’unités d’assemblage tournées vers la transformation locale. Si cette orientation peut dynamiser l’emploi et la chaîne de valeur nationale, elle exige également un engagement fort de l’État en matière de formation, d’énergie et de logistique. Là encore, les besoins en capital annuel sont importants, et posent la question d’un partenariat équilibré entre le Gabon et les investisseurs étrangers.
Seul hic, ce projet comme celui porté par le duo FMCT-ANUTTC, ne répond pas à un besoin direct. Loin s’en faut. Le lancement de la Ville verte du Cap Estérias illustre la persistance d’une approche de plus en plus technocratique du développement. Spectaculaire certes, mais coûteuse et peu connectée aux besoins immédiats des populations. Alors que des milliers de familles vivent dans des logements insalubres ou surpeuplés, il est légitime de se demander si le Gabon peut encore se permettre d’investir dans des projets d’apparat sans impact direct sur la justice sociale et le bien-être collectif.