La Société gabonaise de raffinerie (Sogara), unique raffinerie du Gabon, veut changer la donne. Ce 28 avril, son directeur général, Christian Avaro Yeno, a dévoilé un projet d’expansion à long terme devant le ministre du Pétrole. L’objectif est clair : faire du Gabon un pays autosuffisant en carburant d’ici 2030, tout en anticipant les besoins du marché jusqu’en 2050. Un chantier estimé à 40 milliards de fcfa, qui marque une volonté de transformation structurelle du secteur énergétique.

Actuellement, le pays raffine moins de 10% de sa production pétrolière et importe massivement du carburant pour 655 milliards de fcfa en 2023. Avec une capacité actuelle de 900 000 tonnes, la Sogara reste sous-dimensionnée face à une demande nationale qui dépasse le million de tonnes. D’où ce projet en deux phases : une modernisation de l’usine de Port-Gentil d’ici 2027, suivie de la construction d’une nouvelle raffinerie sur un site de 130 hectares à l’horizon 2030.

Mais au-delà de la seule couverture des besoins, ce projet vise à repositionner le Gabon comme acteur industriel stratégique en Afrique centrale. Grâce à des technologies avancées, hydrocraquage, désulfuration, récupération d’hydrogène et traitement des gaz, la future unité pourra offrir des carburants de meilleure qualité, réduire l’impact environnemental et valoriser la partie lourde du brut localement.

Cette montée en puissance pourrait aussi ouvrir la voie à l’exportation de produits raffinés vers les pays voisins, renforcer la souveraineté énergétique du Gabon, et réduire significativement la pression sur les réserves de change liées aux importations. À moyen terme, l’État pourrait également capter davantage de revenus via la chaîne de valeur locale, en créant des emplois qualifiés et en attirant de nouveaux partenariats techniques et financiers.

En investissant dans son raffinage, le Gabon ne se contente pas de résoudre un problème d’approvisionnement. Il tente de franchir un cap stratégique, celui d’un pays pétrolier qui raffine, transforme et exporte. Une ambition que peu de pays producteurs sur le continent ont réussi à concrétiser à ce jour.

ENCADRÉ : ce que le Gabon dépense en carburant importé
En 2023, le Gabon a importé pour 655 milliards FCFA de carburant afin de satisfaire une demande nationale estimée à 1,1 million de tonnes. Pourtant, la Sogara, seule raffinerie du pays, n’a traité que 666 124 tonnes de pétrole brut sur une production annuelle nationale de 10,9 millions de tonnes. Tripler la capacité de raffinage à 2,772 millions de tonnes par an d’ici 2030 permettrait non seulement de couvrir les besoins internes, mais aussi de réduire une facture énergétique lourde pour les finances publiques.