En l’espace de quelques semaines, Malabo a consolidé sa position comme capitale diplomatique de l’Afrique centrale. En accueillant coup sur coup la visite du président gabonais Brice Clotaire Oligui Nguema pour le règlement du contentieux frontalier autour de l’île Mbanié, puis la 26ᵉ session de la Conférence des chefs d’État de la CEEAC, la Guinée équatoriale a su capitaliser sur le momentum régional. Une montée en puissance qui contraste avec l’effacement progressif du Gabon sur la scène diplomatique sous-régionale.
Le dossier sensible de l’île Mbanié, tranché en faveur de Malabo par la Cour internationale de justice, a été suivi d’une initiative conjointe de dialogue par la mise en place d’un comité d’experts. Si le ton reste officiellement conciliant, le verdict a sérieusement entamé la position du Gabon, dont les revendications historiques ont été invalidées. En répondant rapidement par l’ouverture d’un dialogue, Malabo a renforcé sa stature de nouvelle puissance responsable, tandis que Libreville, fragilisé par la décision de la CIJ, a dû composer avec un rapport de force défavorable.
Ce déséquilibre s’est prolongé sur le plan institutionnel lors du sommet de la CEEAC du 7 juin 2025. Alors que la présidence tournante devait revenir au Rwanda, la Guinée équatoriale a vu son mandat prolongé d’un an, avec le soutien implicite de la RDC et du Burundi, qui s’opposaient à Kigali. En toile de fond, l’absence d’initiative forte du Gabon, pourtant traditionnellement influent au sein de la communauté, illustre une perte d’influence palpable. Le départ du Rwanda, en réaction, renforce encore la centralité de Malabo au sein d’une CEEAC en recomposition.
Dans ce climat tendu, la diplomatie gabonaise paraît sur la défensive. Réduite à un rôle d’observateur dans des négociations cruciales, elle peine à formuler une stratégie régionale cohérente. À l’inverse, la Guinée équatoriale s’impose comme le moteur du prochain chantier régional : le lancement de la zone de libre-échange prévu pour août 2025. Ce leadership assumé dans les dossiers de sécurité, d’économie et de gouvernance régionale confirme la dynamique ascendante de Malabo.
Ainsi, alors que Libreville traverse une phase d’ajustement post-transition, Malabo s’affirme comme la nouvelle plaque tournante du pouvoir en Afrique centrale. Portée par des choix stratégiques audacieux et un contexte diplomatique favorable, la Guinée équatoriale redessine le paysage régional. Une réalité que le Gabon, en quête de réaffirmation, ne peut plus ignorer s’il entend retrouver sa place au cœur de l’échiquier sous-régional.