Engagé par l’Etat gabonais et notamment le ministère en charge de l’Economie et de la Relance, afin d’auditer les états financiers du Fonds spécial de lutte contre l’épidémie de Coronavirus sur la période 2020-2021, le cabinet spécialisé Deloitte Touche Tohmatsu n’a pas été en mesure de certifier ces comptes. Entre absence de factures, absence de bons de réception de fournitures, de matériels, d’équipements, ou encore de travaux réalisés en lien avec lesdits équipements dont le montant pour la seule année 2020 dépasse les 15 milliards de fcfa, le cabinet indépendant a été dans l’impossibilité d’exprimer « une opinion favorable ».
Quelques semaines à peine après la visite des services du Fonds monétaire international (FMI), le gouvernement gabonais a reçu du cabinet indépendant chargé de l’audit des états financiers du Fonds spécial de lutte contre l’épidémie de Coronavirus sur la période 2020-2021, les deux premiers rapports y relatifs. Bien que ne concernant qu’une infime partie des fonds reçus par l’Etat gabonais dans le cadre de la riposte, ces deux rapports mettent la lumière sur la gestion plus que douteuse des autorités. Une gestion qui en plus d’être peu orthodoxe, lève le voile sur plusieurs pratiques bien connues des salons feutrés.
En effet, outre le fait que certaines dépenses à l’image des 500 millions de fcfa pour l’achat d’équipements informatiques, 100 millions en véhicules de services, 300 millions en fournitures divers, 200 millions de fcfa en alimentation ou encore 625 millions de fcfa en frais de missions et de transport, se révèlent déjà ubuesque, c’est l’absence d’éléments probants et de documentations qui interpellent. Des éléments qui, en plus de manquer à l’appel, interrogent sur la réelle destination prises par ces fonds dans un contexte où les populations se sont retrouvées précarisées à souhait.
Rappelant ces nombreux « dérapages budgétaires substantiels » déjà mis en avant par les services du FMI il y a quelques années, ces deux rapports publiés par le cabinet en charge de ces audits financiers, qui seront sans aucun doute scrutés avec attention par les administrateurs de l’institution de Bretton Woods qui devraient par la suite verrouiller leur financement, mettent surtout en exergue la boulimie d’un gouvernement complètement perché.
Entre « réserves » et « impossibilité d’exprimer une opinion favorable », Deloitte Touche Tohmatsu qui a mené ces deux audits couvrant les périodes du 31 mars 2020 au 31 août 2021 pour un montant de moins de 50 milliards de fcfa sur les 700 reçus par l’Etat, aura donc dû faire face au quotidien des populations gabonaises. Un quotidien rythmé par des détournements massifs de fonds, des surfacturations, une absence de documentation et de traçabilité, mais surtout une volonté farouche du gouvernement de justifier ses dépenses. Toute chose qui devrait, comme on pouvait s’y attendre, remettre en cause la poursuite du programme récemment conclu avec le FMI.
Nous y reviendrons.