Englué dans une crise de gestion et de gouvernance depuis plusieurs années, notamment ces « dérapages budgétaires substantiels » évoqués dès 2018 par une mission du Fonds Monétaire International (FMI), l’économie gabonaise s’est enfoncée un peu plus dans la crise au plus fort de la pandémie de covid-19. Entre détournements massifs révélés par les rapports d’audits sur la gestion des fonds covid, récession comme l’a souligné le ministère du Budget et des Comptes publics en marge de la présentation du budget 2023 et un niveau de dépenses extrêmement élevés pour des résultats plus que mitigés, l’année 2020 a laissé des traces durables.
Selon le projet de loi de règlement relatif à la gestion 2020, le PIB réel a régressé sous l’effet d’une pandémie de covid-19 dont les effets se font encore ressentir. Enregistrant une récession de -1,8% contre une croissance de +3,9% à fin 2019, l’économie nationale a pâti des choix peu judicieux de l’exécutif dans un contexte où l’activité économique mondiale s’est caractérisée par une décélération consécutive aux crises financière et sanitaire ainsi qu’au recul de la consommation.
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En effet, alors que le recul de 3,1% de la production mondiale incitait à la prudence et aux restrictions en matière de dépenses publiques pour faciliter le retour à la normale, l’exécutif a maintenu son train de vie dispendieux en mettant l’accent sur des dépenses non prioritaires au détriment des dépenses d’investissements. Résultat, malgré des recettes budgétaires perçues de l’ordre de 1.468,4 milliards de fcfa, les dépenses ont été exécutées à hauteur de 1.799,3 milliards de fcfa. Dépenses au titre desquels les comptes d’affectation spéciale seuls, ont été exécutés à hauteur de 119,5 milliards de fcfa, soit l’équivalent de 200 km de routes bitumées.
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Avec une exécution des opérations budgétaires, qui tient compte des opérations du budget général et des comptes d’affectation spéciale soldée par un déficit de 273,8 milliards de fcfa, des malversations démontrées par les raports d’audit 2020 et 2021 qui mettent en relief des opérations de trésorerie inédites pour un pays qui entend « optimiser ses ressources », cette année 2020 n’aura donc eu pour seule conséquence que d’aggraver un peu plus la fracture sociale et le niveau d’endettement. Dans un pays qui manque cruellement d’infrastructures routières, sanitaires, scolaires et énergétiques, cette année 2020 à marquer d’une pierre rouge laissera sans aucun doute des traces.
Reste désormais à savoir si les deux chambres du Parlement, dont l’Assemblée nationale (7,5 milliards de fcfa de budget alloués en 2021) et le Sénat (6,5 milliards de fcfa de budget alloué en 2021), auront la capacité de demander des comptes aux membres du gouvernement, notamment sur la gestion de la manne financière qu’ont représenté les fonds covid-19, mais également sur la gestion du budget de l’Etat qui, on le rappelle, se chiffrait en 2020 à 3330 milliards de fcfa.