dimanche, avril 28, 2024
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    Gabon : une pénurie de sucre à Sucaf destinée à forcer la main de l’État?

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    C’est le constat effectué par les populations gabonaises depuis quelques mois. Après avoir été contraint l’an dernier et en début de cette année de rationner leur consommation d’huile et de farine, les populations sont cette fois confrontées à une pénurie de sucre. Causée pour certains par des difficultés logistiques et pour d’autres par les difficultés financières de la Sucrerie Africaine (Sucaf), cette situation inquiète sur le fonctionnement de ce secteur première nécessité d’une part, et sur le monopole dévolu au français SOMDIAA d’autre part. 

    « La Sucrerie Africaine (Sucaf) est déficitaire et nous sommes confrontés à plusieurs difficultés financières : nos pertes se situent autour de 2, voire 3 milliards de francs CFA  par an ». C’est ce qu’affirmait il y a quelques jours à nos confrères de Jeune Afrique, Donald Ollo Nguema, son directeur commercial et marketing. Leader d’un secteur dans lequel il a un monopole jamais remis en question, la filiale du français SOMDIAA, peine depuis des mois à assurer l’approvisionnement du pays. Rejetant pendant un moment la faute sur la société d’exploitation du Transgabonais (Setrag), filiale d’Eramet, un autre géant français, la société sucrière semble au final vouloir forcer la main de l’État gabonais. 

    Et pour cause, en l’invitant « à s’asseoir autour de la table et discuter », comme l’a également indiqué Donald Ollo Nguema, la société sucrière née on le rappelle sur les cendres de la SOSUHO (Société Sucrière du Haut-Ogouée) en 1998, semble vouloir en demander plus à l’Etat, qui avait plafonné le prix du kilogramme de sucre entre 800 et 925 fcfa. Déterminée semble-t-il à recourir à un bras de fer avec les autorités visant, in fine, à augmenter les prix sur le marché au grand dam des consommateurs déjà sous asphyxie, la filiale de SOMDIAA devrait logiquement maintenir sa position.

    Évoquant un « projet de développement qui ne se fera pas sans l’appui de l’État pour optimiser les conditions de production et d’acheminement du sucre », la société sucrière qui exploite plus de 13 000 ha de plantations de cannes à sucre, en a profité pour souligner le fait que « son usine tourne à plein régime, et près de 2 000 tonnes de sucre sont en attente d’acheminement pour approvisionner les marchés », entend donc faire plier l’État d’une manière ou d’une autre. Une situation qui rappelle celle ayant conduit à l’aboutissement de la nouvelle mercuriale des prix, fixant entre autre celui du kilogramme de poulet (aliment le plus consommé par les ménages) à près de 1500 fcfa. 

    Campant sur ses positions, désireuse de « doubler sa production annuelle, qui se situe aujourd’hui à près de 27 000 tonnes, pour atteindre des volumes beaucoup plus importants », des chiffres qui représentent près de la moitié de la production annuelle ivoirienne (112 324 tonnes en 2022), un pays 15 fois plus peuplés que le Gabon, la société sucrière pourrait obtenir gain de cause et donc profiter un peu plus du Gabon pour étendre son influence dans la sous-région. Rappelant étrangement le cas d’Olam, spécialiste local de l’huile de palme qui tire profit du pays à plus d’un titre, cette situation en remet une couche sur l’étiolement de la souveraineté économique du pays. 

    Soulignant les insuffisances de l’Etat gabonais en matière d’infrastructures routières et ferroviaires, en matière d’investissements publics et en matière développement des industries locales, ce bras de fer entre Sucaf et l’exécutif, témoigne de la fébrilité actuelle de notre économie. Une économie qui malgré un niveau d’endettement passé de 918 milliards de fcfa en 1991 à 6230 milliards de fcfa en 2021, n’a pas su nationaliser ses industries essentielles, fragilisant un peu plus son tissu social. 

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