vendredi, avril 26, 2024
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    Télesphore Obame Ngomo : « un triomphalisme injustifiable et suicidaire »

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    Dans une tribune publiée sur sa page Facebook intitulée « Le débat de Missélé eba’a », le président de l’Organisation patronale des médias (Opam), Télesphore Obame Ngomo invite les tenants du pouvoir à changer la « tête du gouvernement » actuel « ainsi que les ministres au cv et à l’épaisseur politique inexistants », dit-il avec insistance. Nous publions intégralement ladite tribune. Lecture.

    « Il y a un principe bien connu dans l’univers politique qui est celui de ne jamais sous-estimer un adversaire. C’est pourquoi, en son temps, Omar Bongo Ondimba qui est resté 42 ans sur le fauteuil présidentiel a toujours cherché à limiter le nombre de ses adversaires quand il ne les fabriquait pas lui-même. 

    En 2012, en sous-estimant la détermination et la pugnacité de François Hollande, Nicolas Sarkozy en a fait les frais. Comme un bleu de la politique, il s’est fait bouffer à la petite cuillère par la fraise des bois de Laurent Fabius. 

    Dans le contexte de la présidentielle gabonaise de 2023, au lieu de (1) chercher les arguments pouvant défendre le bilan des 14 ans d’Ali Bongo Ondimba sur le fauteuil présidentiel, (2) de trouver les mots qui justifieraient un énième mandat du fils d’Omar Bongo à la présidence de la République après son AVC handicapant et dépendant, (3) de convaincre tous ceux qui ont été injustement traité durant les deux mandats comptabilisés, c’est plutôt un triomphalisme injustifiable des extraterrestres du pouvoir auquel on assiste. 

    Voici des gens (1) qui n’ont jamais rien prouvé de tout le temps passé au sommet de l’État, (2) qui ne savent même pas comment s’organise une élection présidentielle, (3) qui n’ont jamais fait du terrain ou le moindre débat télévisé pour vendre leur choix, mais osent appeler à la candidature d’un homme fragilisé par la maladie. Mieux, ils se font des films en offrant un portrait caricatural et impertinent de l’opposition gabonaise. 

    En disant que (1) l’opposition gabonaise n’existe pas, (2) qu’elle n’aurait pas de programme ou (3) qu’elle ne serait pas une alternative crédible pour occuper le fauteuil présidentiel, une seule question s’impose à ces affabulateurs en plein délire : « 14 ans au sommet de l’État pour quels résultats ou pour quel management humain ? ».

    De façon successive, il a été annoncé aux gabonais un certain nombre de projets réalisables. Qu’en est-il des 5000 logements par an ? Qu’en est-il des universités modernes dans chaque province ? Qu’en est-il des hôpitaux innovants et compétitifs ? Qu’en est-il des entreprises génératrices de revenus pour les gabonais ? Qu’en est-il de la transgabonaise dont la propagande est plus que jamais réduite au silence ? 

    Qu’en est-il de la Marina devenue Baie des rois sans toit pour finir en Promenade des rois sans voix ? Qu’en est-il du projet graine qui a englouti des centaines de milliards sans aucun résultat ? Qu’en est-il du coût de la vie au Gabon ?  Qu’en est-il des retraités qui vivent leurs derniers jours dans la misère ? Qu’en est-il des forces armées qui peinent à vivre dignement ? Qu’en est-il des enseignants, du corps médical qui n’arrivent plus à s’épanouir dans leur vocation ? 

    Qu’en est-il du mérite quand des gens comme Jessy « Ella Ekogha » sont désormais porte-parole de la présidence de la République ? Quand Noureddine Bongo Valentin peut être Coordonnateur général des affaires présidentielles ? Quand des individus comme Max Samuel Oboumadjogo deviennent ministre de l’Enseignement supérieur et de la culture dans notre pays ? Quid du background au Gabon ? 

    Qu’en est-il de la loyauté, de la fidélité au sommet de l’État quand toute la garde rapprochée du président de la République se retrouve décapitée pour des raisons émotionnelles ? Quand tous les grognards d’Ali Bongo se retrouvent assis à la maison contemplant les tares de gestion du gouvernement Ossouka Raponda ?  

    Donc Antonella Ndembet mérite plus que Guy Bertrand Mapangou d’être au gouvernement ?  Donc Vincent de Paul Massassa mérite plus sa place que Nenest Mpouhot ? Donc Michel Menga ou Franck Nguema mérite plus leur place au gouvernement que Paskhal Nkoulou ou Arnaud Engandji qu’on a tous vu défendre Ali Bongo en 2016 ?  Donc Lee White et Patrick Daouda Mouguiama qui n’ont aucun fief politique méritent plus leur place au gouvernement que Flavien Enongoué ou Guy Rossatanga Rignault ? 

    Voici des erreurs de casting qui sont de grandes injustices. Elles ne peuvent que susciter frustration et démobilisation. Les erreurs du premier septennat semblent n’avoir pas servies de leçons. L’hyper délégation du pouvoir présidentiel par Ali Bongo à des gens qui n’ont aucune légitimité, très peu de qualités et une légalité somnolente fait qu’il sera difficile ou suicidaire de penser que l’élection présidentielle à venir passera comme une lettre à la poste. 

    Trop de frustration à l’intérieur de la machine du pouvoir coûtera sans aucun doute cher à Ali Bongo Ondimba. Cette situation est une aubaine pour l’opposition qui en réalité n’est composée, pour ce qui est des principaux leaders, des victimes ou des réfractaires à cette gestion bancale du pouvoir présidentiel. 

    On ne peut quitter d’une gestion brutale du pouvoir présidentiel sous le règne de la Légion étrangère à une gestion folklorique sous l’ère du messager intime à une gestion agressive et épidermique sous les tenants de la maisonnée du président de la République. Tout ça pour quel résultat ?  Voici le débat de fond qui devrait préoccuper ceux qui rêvent d’un troisième mandat pour Ali Bongo Ondimba. 

    L’histoire nous raconte qu’en 2012, à cause de toutes ses tares de gestion entrainant de grandes frustrations, les barons de la droite française ont laissé Nicolas Sarkozy perdre face à François Hollande quand ils ne l’ont pas carrément aidé à mordre la poussière. Les mêmes causes ne peuvent produire que les mêmes effets. 

    De cette situation grave, profitant d’une occasion inouïe et unique, la droite ordinaire profitait pour régler le vieux contentieux qu’elle avait avec Nicolas Sarkozy depuis son coup tordu fait à Charles Pasqua à la mairie de Neuilly-sur-Seine. 

    Cette fois-ci les caciques du régime omarien régleront le vieux contentieux qu’ils avaient avec les rénovateurs qui avait pour tête de proue Ali Bongo Ondimba. L’homme est désormais fragilisé par la maladie et isolé par les siens. Tout pour en faire une bouchée. 

    Il faut dire que par leur gestion étrange du pouvoir, Ali Bongo et ceux à qui il l’a toujours délégué ont pulvérisé tout ce qui pouvait encore rattacher les cadres du parti au pouvoir à sa cause. Les siens qui régentent actuellement le pays le font tellement mal que la seule solution pour en sortir est soit le complot alimentée par une conspiration interne légitime, soit par le soutien à l’opposition qui avait goûté plus tôt à l’amertume de ce pouvoir devenu arrogant, violent et ingrat. 

    L’unité de l’opposition au premier tour pour une élection à deux tours serait tout simplement un suicide public inutile. Quid de leur réserve de voix si elle faisait bloc dès le premier tour ? Les candidats devraient se parler ou s’affronter dans la dignité en évitant les petites phrases assassines ridicules et inutiles. Par conséquent, parler d’union de l’opposition pour un tel mode de scrutin est faire preuve d’amateurisme. À vos classes messieurs… 

    Ensuite, qui peut penser que Guy Nzouba Ndama et ses cadres dynamiques des Démocrates, Paulette Missambo entourée des brillants cadres de l’Union nationale ou Barro Chambres, le digne fils de son père, le premier docteur en médecine du Gabon, Marcel Eloi Chambrier, et ses cadres déterminés pour l’alternance avec le Rassemblement pour la Patrie et la Modernité, pourront aller à une telle élection sans un projet fiable et viable ? 

    Les nouveaux penseurs du régime gagneraient alors à (1) faire froidement le bilan des années de présidence de la République avec Ali Bongo au sommet, (2) à mesurer le degré d’impopularité du présent gouvernement, (3) à voir si les chevaliers d’hier frappés par l’ingratitude et l’arrogance des différents présidents bis sont encore disposés et disponibles pour le combat de 2023. 

    Au regard de tous ces chantiers et de tous ces feux au rouge, soit les nouveaux décideurs qui ont préféré le Commonwealth à la France font un virage à 180 degré en donnant le tam-tam aux véritables batteurs avant qu’il ne soit définitivement trop tard, soit un acteur du pouvoir qui n’a rien contre les baisers russes mais préfère tout de même l’histoire avec l’Occident et qui n’est nullement caution solidaire du pouvoir exécutif en place affûte ses armes pour affronter à la régulière des acteurs de l’opposition au profil connu. 

    Dans les deux cas de figures, la tête du gouvernement ne peut rester ce Premier ministre ectoplasme. Rose Christiane Ossouka Raponda doit partir ainsi que les ministres au cv et à l’épaisseur politique inexistants. La jurisprudence Pompidou est assez édifiante en la matière. Le pouvoir en place pourrait s’en inspirer s’il compte toujours demeurer sur le fauteuil présidentiel. 

    À cette heure de la situation, tout triomphalisme pompeux est du bluff sans lendemain. Bien heureusement… »

    Télesphore Obame Ngomo

    Président de l’OPAM

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