Nestlé, le titan suisse de l’industrie alimentaire, se trouve au centre d’une polémique pour ses pratiques de formulation de produits destinés aux enfants dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Selon une récente étude menée par Public Eye, une organisation d’investigation basée en Suisse, la compagnie inclut délibérément des sucres ajoutés, tels que le saccharose et le miel, dans ses produits pour bébés vendus en Afrique, en Asie et en Amérique latine.
Cette pratique, qui concerne 94 % des produits examinés dans ces régions, contraste fortement avec les stratégies adoptées sur les marchés européens, où ces ajouts sont absents des aliments pour bébés âgés de six mois à un an.
Pour les spécialistes, cette réalité est d’autant plus alarmante qu’elle intervient malgré les directives de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui, en 2022, a recommandé une interdiction des sucres et des édulcorants ajoutés dans les aliments pour les enfants de moins de trois ans. L’OMS a clairement souligné l’importance pour l’industrie alimentaire de jouer un rôle proactif dans la promotion de la santé publique en reformulant les produits destinés à cette tranche d’âge vulnérable.
Équité et égalité des standards
Les implications de telles pratiques sont sérieuses et multiples. Premièrement, elles soulèvent des questions éthiques sur l’équité et l’égalité des standards entre les consommateurs selon leur localisation géographique et leur niveau économique. Pourquoi un bébé né en Europe bénéficierait-il de standards nutritionnels plus stricts que son homologue dans un pays en développement ? Cette politique de « deux poids, deux mesures » pourrait être perçue comme une exploitation des réglementations moins strictes dans certains pays pour maximiser les profits au détriment de la santé des enfants.
Ensuite, l’ajout de sucre dans les aliments pour bébés augmente le risque de développer très tôt des préférences pour les goûts sucrés, ce qui peut conduire à des habitudes alimentaires malsaines persistantes à l’âge adulte. Une telle exposition précoce au sucre est associée à une augmentation du risque d’obésité, de diabète de type 2, et d’autres maladies chroniques non transmissibles, mettant en péril l’avenir sanitaire de générations entières.
Harmonisation des standards internationaux
Il est impératif que les organismes de réglementation des différents pays prennent des mesures robustes contre ces pratiques douteuses. Cela nécessite une collaboration internationale pour harmoniser les standards de sécurité et de qualité des aliments pour enfants, avec un mécanisme de contrôle et des sanctions pour les entreprises qui ne se conforment pas aux meilleures pratiques internationales.
Face à cette situation, Nestlé doit revoir ses formulations pour soutenir des objectifs de santé publique globaux, affirmant ainsi son engagement envers le bien-être des consommateurs les plus jeunes, indépendamment de leur lieu d’origine. Cette démarche est non seulement une nécessité éthique mais elle renforcerait également la confiance des consommateurs dans la marque, important acteur global de l’industrie alimentaire.