samedi, juillet 27, 2024
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    Janis Otsiemi : “Lettre ouverte au général Brice Clotaire Oligui Nguema”

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    Dans une lettre ouverte qu’Inside News241 a reçu en exclusivité, l’écrivain Janis Otsiemi interpelle le président de la Transition, le général Brice Clotaire Oligui Nguema, au lendemain de la clôture du Dialogue national inclusif. L’écrivain soupçonne le président d’avoir préparé son coup en façonnant un pouvoir à sa juste mesure et en utilisant ses concitoyens. Pour lui, le « vrai gagnant de ce dialogue national exclusif », c’est le général-Président. Lecture. 

    Monsieur le Président de la Transition,

    Je me permets à nouveau de vous écrire une lettre ouverte par voie de presse et des réseaux sociaux bien que j’aurais aimé vous l’adresser directement par le biais de votre cabinet civil. Mais je doute encore une fois de plus que vos conseillers vous l’auraient transmise, peut-être pour épargner votre susceptibilité !

    La politique, une scène de théâtre ?

    Monsieur le Président de la Transition,

    Le 2 avril 2024, vous avez lancé en trompette un dialogue national que vous vouliez inclusif mais qui s’est avéré dès le départ comme un dîner de gala dont vous avez choisi vous-même les invités, les troubadours et les prédicateurs qui devaient divertir ces derniers. Au terme de plusieurs jours de travaux qui ont finalement débuté le 8 avril, le rapport final des recommandations de ce dialogue vous a été dévoilé officiellement le 30 avril sous les lambris du palais du bord de mer, car officieusement, vous en connaissez déjà la teneur. La politique est aussi une scène de théâtre, je vous le concède, volontiers.

    Lorsque le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) a dévoilé le 13 novembre dernier le chronogramme « à titre indicatif » de la transition, nous étions bien nombreux à vous soupçonner d’avoir déjà commencé à intriguer contre vos citoyens. Car nous  n’imaginons pas un seul instant qu’après avoir goûté aux délices du pouvoir dont vous étiez coutumier sous l’ère d’Omar Bongo et dont vous reproduisez consciemment les défauts, vous êtes enclin à céder le trône et à regagner une caserne militaire à la fin de la transition. 

    LIRE AUSSI : Lettre ouverte à Ali Bongo Ondimba : Janis Otsiemi persiste et signe à nouveau 

    Pardonnez notre incrédulité, nous avons du mal à vous imaginer en jeune retraité sur les bords du fleuve Ogooué ou dans votre ville natale de Ngouoni. Les recommandations issues du dialogue national « exclusif » sur votre avenir politique renforcent nos soupçons. Fait intrigant : lors de la remise du rapport final dudit dialogue au palais du bord de mer, nous nous sommes étonnés de découvrir parmi les invités à ce vaudeville des hommes et des femmes portant des tee-shirts frappés à votre effigie qui scandaient votre nom à gorge déployée, à croire que nous assistions sur notre petit écran à un meeting politique à votre gloire !

    LIRE AUSSI : Première chronique du règne de Brice 1er, Grand Sauveur de la Nation devant l’Eternel 

    Le vrai gagnant de ce dialogue ?

    Monsieur le Président de la Transition,

    Nonobstant les recommandations significatives sur le plan politique, économique et social dont je ne ferais pas ici la litanie ou la liturgie, le vrai gagnant de ce dialogue national exclusif, c’est vous et non le peuple gabonais. Aucune instance ou institution ne vous contraint à appliquer les recommandations issues de ce dialogue national exclusif qui n’a pas de caractère souverain. 

    Monsieur le Président de la Transition,

    Le vrai gagnant de ce dialogue national exclusif, c’est vous ! Certes, le rapport final de ce dialogue national préconise la durée de la transition à deux ans, mais suggère un an supplémentaire le cas échéant ! 

    Monsieur le Président de la Transition,

    Le vrai gagnant de ce dialogue national exclusif, c’est vous ! Le même rapport final de ce dialogue préconise la suppression du poste de Premier ministre, ce qui renforcerait votre main mise sur l’exécutif !    

    Monsieur le Président de la Transition,

    Le vrai gagnant de ce dialogue national exclusif, c’est vous ! La Charte de la Transition qui a été taillée à la mesure de votre treillis et de vos galons n’ayant pas été discutée durant les travaux de ce dialogue national exclusif,  elle vous donne librement le droit de vous présenter à la prochaine élection présidentielle. Vous avez devant vous une avenue pavée de bonnes intentions !

    Écarter les potentiels adversaires

    Monsieur le Président de la Transition,

    Le vrai gagnant de ce dialogue national exclusif, c’est vous ! Cette même Charte vous permet d’écarter vos potentiels adversaires parmi lesquels les membres du gouvernement et les hauts responsables de la République qui prennent part à la transition. Car ils sont inéligibles à la prochaine élection présidentielle ! 

    Chapeau, l’artiste !

    LIRE AUSSI : Chronique du sacre du roi Brice 1er, Grand Sauveur de la Nation devant l’Eternel 

    Dès les premiers mois de votre règne, nous étions nombreux à vous comparer dans les salons feutrés de Libreville à Napoléon Bonaparte. La ressemblance était assez troublante. Vous êtes général comme il le fut. Vous avez réalisé un coup d’Etat comme il le fit. Vous, chef d’Etat à quarante-huit ans, lui empereur à trente-cinq ans. Vous partagez une vision commune : apparaître comme l’homme providentiel, rétablir la méritocratie, restaurer et fortifier les institutions de l’Etat – y compris dans le domaine privé et matrimonial -, apaiser les antagonismes pour les détourner à votre profit, faire montre de bienveillance à l’égard de l’aristocratie de l’ancien régime. Mais au fil des mois, nous nous sommes rendu compte que vous n’avez rien d’un général Bonaparte des temps modernes car, doté d’une nature cabotine, vous êtes adepte de l’accord négocié et du compromis à la frontière tenue de la compromission, sensible aux principes de stratèges chinois qui enseignaient comment conquérir sans combattre. Aussi, ce dialogue exclusif n’aura pas été un second coup d’Etat de libération, mais plutôt un coup d’Etat citoyen !

    Chapeau, l’artiste !

    Monsieur le Président de la Transition,

    A la lecture de Machiavel dont vous ne manquez point de vous en enorgueillir, je vous oppose cet article de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ».

     Ne m’en voulez point pour mon outrecuidance.

    Janis Otsiémi

    Ecrivain

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